La Terrasse

"La culture est une résistance à la distraction" Pasolini

La formation théâtrale en France

Les épines et les roses 

Les épines et les roses  - Critique sortie

Publié le 10 mars 2011

Sociétaire honoraire à la Comédie-Française, grande figure du théâtre, homme
de culture et d’intelligence, Roland Bertin porte la mémoire d’un demi-siècle
passé sur les planches.

Vivre pour jouer

« Etre comédien, c’est non seulement interpréter mais aussi donner beaucoup
de soi-même à lire. Il faut donc être riche de vécu, d’expériences, de
souffrances, de douleurs, de joies. Les gens passionnants sont ceux qui portent
tout ça. Le talent, c’est cette personnalité chargée d’émotion, de joie, de
désir : quelque chose surgit alors qui est autant une personne qu’un personnage.
Il faut avoir les yeux ouverts, les mains ouvertes et être curieux. On fait du
théâtre pour échapper à son milieu, à sa condition, pour embrasser
définitivement le rêve et le monde de l’enfance, pour toujours continuer à
jouer, à raconter une histoire comme le font les enfants. »

Nudité et pauvreté

« Il y avait une insouciance à mon époque qu’il n?y a plus. Dormir dans une
chambre de bonne, se nourrir d’un ou deux sandwichs, peu nous importait. Nous
n?étions pas dans des perspectives de carrière ; peut-être parce qu’alors on
pouvait vivre avec moins d’argent? Ce n?est pas que je crois qu’il faille que le
théâtre soit pauvre ni que la pauvreté donne plus de talent, mais il faut qu’un
acteur puisse être nu. Aujourd’hui, avant même de monter un projet, on demande
des subventions. Or Ghelderode, Audiberti, Beckett, Dubillard étaient créés
devant des salles vides ! J’ai vu monter des chefs-d’?uvre avec deux tables et
trois sous ! En ce temps-là, on vendait son lit comme les Pitoëff pour jouer :
l’Etat ne donnait rien ! Qand Chéreau a monté Les Soldats de Lenz, il
s’est mis des dettes incroyables sur le dos sans attendre la manne de l’Etat.
Aujourd’hui, on attend tout de cette corne à finances ubuesque? »

« A mon âge, je continue toujours à apprendre comment appréhender un texte,
un personnage, un rôle, une écriture, la rencontre avec des camarades de jeu. » 

Conseils à un jeune acteur

« Le premier conseil, c’est de ne pas faire de théâtre ! Il faut décourager
pour jauger, ne pas faire au jeune comédien un chemin de roses mais un chemin
d’épines, de rocaille. Le métier de comédien est difficile, long et continu. A
mon âge, je continue toujours à apprendre comment appréhender un texte, un
personnage, un rôle, une écriture, la rencontre avec des camarades de jeu : à
chaque fois, il s’agit de se remettre à nu avec énergie et pudeur. J’ai encore
le trac, encore la peur au ventre et j’ai fait mon quotidien de cette panique !
Pour enseigner, il faut être exigeant : l’être avec amour, certes, mais ne pas
flatter. C’est à ce prix-là qu’on peut savoir si quelqu’un est fait pour ce
métier où il faut apprendre à digérer les critiques, à supporter le calme plat
après la grande chaleur, à vivre avec le désert autour de soi. Si après viennent
les fleurs, les compliments et le champagne, c’est tant mieux, mais avant
d’avoir ça, il faut se préparer au pire ! Et puis il y a la chance et les
rencontres, avec des metteurs en scène et des auteurs que je n?ai pas ratés : il
faut savoir donner de soi en allant à la rencontre des autres. »

Propos recueillis par Catherine Robert

A propos de l'événement


x

Suivez-nous pour ne rien manquer sur le spectacle vivant

Inscrivez-vous à la newsletter

x
La newsletter de la  Terrasse

Abonnez-vous à la newsletter

Recevez notre sélection d'articles sur le spectacle vivant