La Terrasse

"La culture est une résistance à la distraction" Pasolini

Le Cirque contemporain en France

CIRCa, terrain de rencontres

CIRCa, terrain de rencontres - Critique sortie
© Christian Voulgaropoulos

Cirque, création et diffusion

Publié le 11 novembre 2014

Cette 27ème édition de CIRCa reflète l’actualité et la vitalité de la création circassienne contemporaine. Depuis 2001, Marc Fouilland dirige le Festival, formidable terrain de rencontres entre artistes, professionnels et public de dimension régionale autant qu’internationale. 

Quelle est l’histoire de CIRCa, plus vieux festival de cirque contemporain en France ?

Marc Fouilland : Le Festival est né d’une initiative de bénévoles de la jeune chambre économique d’Auch, qui cherchait à créer une manifestation sur la ville. Ils se sont appuyés sur la présence d’une des premières écoles de cirque de loisir, créée par un abbé, le Pop Circus, qui a fêté cette année ses 40 ans,  et sur la présence d’Achille Zavatta, qui prenait ses quartiers d’hiver à Auch. Le Festival était au début un concours d’écoles de loisir, intitulé concours international de rayonnement du cirque d’avenir. Le concours a été abandonné au bout de dix ans, puis les écoles de loisir ont été complétées par les écoles professionnelles, en particulier le CNAC de Bernard Turin. Créé en lien avec les fédérations française et européenne des écoles de cirque – dite européenne mais en fait mondiale -, le festival a permis une rencontre entre écoles de loisir et écoles professionnelles, entre artistes, professionnels et public. Beaucoup d’artistes professionnels venus en tant qu’élèves ou amateurs continuent à venir au festival. Il s’intitule aujourd’hui festival de cirque actuel car il reflète l’actualité du cirque. Les spectacles proposés chaque année sont à 90% des spectacles créés au cours des douze derniers mois, voire des deux derniers. Depuis 2012, nous profitons d’un nouveau lieu magnifique, qui nous avons mis quinze ans à faire sortir de terre, où nous accueillons les compagnies en salle ou en chapiteau. Nous avons un chapiteau particulier, sans mât intérieur et totalement isolé par de la laine de roche.

Est-ce important pour vous de défendre le cirque sous chapiteau ?

M. F. : Même si le cirque est présenté à environ 75% en salle, nous tenons à défendre le cirque sous chapiteau. Le chapiteau reste un espace fédérateur de proximité, de rassemblement, d’élargissement des publics, et un espace d’inventivité sur le plan scénographique et esthétique qu’il est vraiment important de conserver. Il incarne à la fois une expression artistique et un mode de vie, et fait partie des utopies de nombreux artistes qui jouent en salle et rêvent de chapiteau. C’est un espace d’autonomie et d’écriture, fondé sur le rapport au cercle, qui demeure un fondamental du cirque pour de nombreuses jeunes compagnies. C’est aujourd’hui difficile de faire ce choix. Les chapiteaux permanents sont peu nombreux et les compagnies préfèrent tourner avec leurs propres chapiteaux, ce qui implique la recherche de modes de financement devant être amortis dans le temps. Ces trois ou quatre dernières années, nous voyons de jeunes équipes prendre ce risque.

« D’autres lieux généralistes, centres dramatiques et autres, doivent aussi investir dans la production du cirque. »

Qu’est-ce qui caractérise votre soutien à la création circassienne ?

M. F. : Nous essayons d’entretenir une fidélité avec certaines équipes et accueillons aussi beaucoup de nouvelles équipes. Une trentaine de compagnies sont accueillies chaque année. Notre ancrage régional est assuré, car la région Midi-Pyrénées compte de nombreuses compagnies de cirque. Par rapport aux autres arts le cirque demande des temps de création vraiment longs, et les temps de diffusion sont aussi plus longs. Les pôles nationaux des arts du cirque ne sont pas suffisamment dotés pour répondre à ces besoins et ce n’est pas forcément bien qu’ils y répondent seuls. D’autres lieux généralistes, centres dramatiques et autres, doivent aussi investir dans la production du cirque. Le cirque reste dans l’organigramme du ministère de la Culture un “département“ du théâtre, comme les arts de la rue ou la marionnette.

Le cirque est-il clairement identifié par le public ?

M. F. : Les compagnies de cirque innovent beaucoup et croisent divers champs artistiques, le cirque évolue sans cesse, il ne peut donc être identifié facilement en s’appuyant sur des repères forts. La diversité est énorme et peu de noms – tels le Cirque Plume ou Johann Le Guillerm – sont finalement connus du grand public. Il faut poursuivre le travail de reconnaissance et de repérage. C’est une question de temps. Un travail sur le répertoire commence heureusement à être effectué, en particulier avec le CNAC.

Qu’es-ce qui caractérise la programmation de cette année ?

M. F. : Elle est plus française que d’habitude car nous accueillons en début de festival le Focus cirque de l’Institut Français, vitrine du cirque français  pour les programmateurs internationaux. En termes de rencontres et de repérages, CIRCa joue un rôle essentiel. Le nouveau cirque est un art jeune qui ne doit pas tomber dans le piège d’une course au jeunisme et à la découverte. Il faut savoir que les spectacles de cirque ont besoin de temps pour que les artistes puissent véritablement appréhender les enjeux techniques, le risque, le jeu et le rapport au public, et finalement s’en libérer. C’est pourquoi depuis cinq ans, nous avons arrêté toute première représentation. Lorsque j’élabore la programmation, 50% des spectacles ne sont pas encore créés, et avant d’être programmées au festival, les compagnies doivent avoir réalisé au moins dix représentations pour rôder et mûrir leurs spectacles. Des spectacles fragiles souvent évoluent, nous l’avons constaté de nombreuses fois. Depuis environ cinq ans, et sans doute en partie à cause de la crise économique, les artistes circulent plus d’un spectacle à l’autre, les équipes se mélangent et rassemblent des artistes confirmés et des jeunes pousses. C’est très positif. Tous ces artistes sont dans une quête permanente et s’efforcent de dépasser leurs propres limites.

Propos recueillis par Agnès Santi

 

CIRCa, 27ème Festival du cirque actuel. Du 17 au 26 octobre. Tél : 05 62 61 65 00.

www. festival-circa.com

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