La Terrasse

"La culture est une résistance à la distraction" Pasolini

Théâtre - Critique

François Nambot met en scène « Arletty, un cœur très occupé » de Jean-Luc Voulfow : une immersion délicate qui effleure son sujet

François Nambot met en scène « Arletty, un cœur très occupé » de Jean-Luc Voulfow : une immersion délicate qui effleure son sujet - Critique sortie Théâtre Paris Théâtre La Scène Parisienne
Crédit photo : Fabienne Rappeneau / Arletty, un cœur très occupé, mise en scène par François Nambot.

La Scène Parisienne / texte de Jean-Luc Voulfow / mise en scène François Nambot

Publié le 17 décembre 2025 - N° 339

Avec Arletty, un cœur très occupé, François Nambot met en scène le texte de Jean-Luc Voulfow et revient sur la liaison de la célèbre actrice, incarnée par Béatrice Costantini, avec un officier allemand durant l’Occupation. Portée par un tendre duo, la pièce s’appuie sur la correspondance entre « Biche » et « Faune » pour interroger leur amour. Une immersion délicate qui effleure son sujet sans l’atteindre pleinement.

Juillet 1970. Un jeune journaliste (François Nambot) s’introduit chez Arletty pour explorer un épisode central de sa vie : sa relation sulfureuse avec Hans Jürgen Soehring, officier allemand dont elle tomba éperdument amoureuse pendant l’Occupation. Pour cela, elle fut arrêtée à la Libération, accusée de « collaboration horizontale », et fit l’objet de nombreuses critiques. C’est pour comprendre cet amour tant décrié et donner la parole à l’actrice que Samuel fait irruption dans son salon et dans sa vie. Dans un décor simple – deux fauteuils blancs, un vase et quelques fleurs, une photographie du soldat aimé qui trône au centre de la pièce –, il l’invite à se replonger dans les lettres passionnées qui ont jalonné la liaison interdite. D’emblée Béatrice Costantini s’impose par sa présence, son phrasé singulier et piquant qui retranscrit la gouaille légendaire d’Arletty. François Nambot est juste et touchant en journaliste audacieux, faussement maladroit et sensible. Ainsi se déploie devant nous un duo délicat dont la dynamique singulière évolue au rythme des lectures des lettres. C’est là une réussite de la pièce : le lien tendre qui émerge entre les protagonistes alors que tous deux revisitent le passé de l’actrice – elle qui remet le jeune homme à sa place avec son franc-parler emblématique puis se laisse aller à la vulnérabilité et lui qui répond avec vivacité et humour et s’émeut de ses élans nostalgiques, jusqu’à un final inattendu.

L’amour malgré tout

Raconter la liaison entre une célèbre actrice française et un officier de la Wehrmacht pendant l’Occupation soulève tant d’interrogations de morale, de mémoire, sur la nature même du sentiment amoureux. Représentation paroxystique du choix de l’amour en dépit de tout, la plongée dans l’histoire de l’actrice et de son soldat effleure ici les enjeux d’un tel récit mais faillit à les explorer pleinement. Le rythme s’enlise parfois dans la redondance des lectures des correspondances et la plume des amants n’est pas à la hauteur de la profondeur de leur passion ni des drames de la grande et des petites histoires. Mais peut-être est-ce là tout le sujet : Arletty aimait Hans Jürgen Soehring et peu leur importait la guerre et le reste. Point de « collaboration horizontale » ni de haute trahison, juste le déploiement d’une relation brûlante. Finalement, c’est un geste audacieux mais inachevé qui est proposé par François Nambot, qui parvient tout de même à exprimer le cœur du propos : l’amour malgré tout.

Hanna Abitbol

A propos de l'événement

Arletty, un cœur très occupé
du jeudi 8 janvier 2026 au dimanche 29 mars 2026
Théâtre La Scène Parisienne
34 rue Richer, 75009 Paris

jeudi à 19h30, vendredi à 21h, dimanche à 16h30, mardi 13 janvier à 19h30, relâche le dimanche 11 janvier.

Tél : 01 42 46 03 63.

Durée : 1h10.

x
La newsletter de la  Terrasse

Abonnez-vous à la newsletter

Recevez notre sélection d'articles sur le Théâtre

S'inscrire