Répondant à une proposition de la compagnie basque Le Théâtre du Rivage, Catherine Anne a écrit Fort, un monologue pour « un homme en prise avec le souffle de sa vie ». La metteure en scène Pascale Daniel-Lacombe signe un spectacle qui pèche par excès de romantisme.
« Un jour, Pascale Daniel-Lacombe et Pascal Sangla m’ont parlé de leur désir (fou) de se lancer dans l’aventure d’un spectacle sur le thème de l’effort,explique Catherine Anne, l’effort pour vivre, l’effort pour créer, l’effort pour surmonter tout ce qui dans l’existence nous écarte de la beauté… » Ainsi est né Fort, un monologue à deux personnages (l’un parle — interprété par Pascal Sangla, l’autre se tait — interprété par Etienne Kimes) qui revient sur l’existence douloureuse d’un jeune pianiste venu donner un récital à l’endroit même où s’élevait, jadis, son village d’enfance, village un jour rayé de la carte par des bombardements. C’est donc en pleine nature, en haut d’une colline sur laquelle est installé un piano, que ce concertiste devenu célèbre se met à faire des confidences à un régisseur muet et énigmatique : « Splendide / Ce petit piano posé dans le silence / La musique j’en joue pour me jouer du silence / Faire sonner le silence / Vous comprenez ». Ainsi, il sera question de musique et de piano, mais également de blessures profondément enfouies, d’une guerre, de souvenirs familiaux, de problématiques relationnelles opposant ce pianiste à son père…
Un récital de piano au sommet d’une colline
Il sera question de nombreux sujets, effleurés plutôt que creusés, sujets portés par une écriture nerveuse et lyrique qui ne parvient pas toujours à s’écarter des poncifs pour trouver une réelle profondeur. Fort joue en effet très souvent de formules, d’aphorismes, de figures de rhétoriques, de complaisances mélodramatiques. Et la mise en scène, loin de pallier les excès du texte de Catherine Anne, finit de donner à ce spectacle des airs assez inconfortables de romantisme bon marché. Car, Pascale Daniel-Lacombe n’est pas parvenue à diriger Pascal Sangla vers les territoires de jeu susceptibles de conférer plus d’épaisseur aux propos de son personnage. Simplicité, dépouillement, singularité : voilà, pour l’essentiel, ce qui semble manquer à cette performance privilégiant le passage en force à la retenue, la démonstration permanente à une forme d’incarnation intériorisée. En trouvant une voie vers davantage de justesse et de complexité, mais aussi en optant pour des créations musicales moins douceâtres, la metteure en scène aurait probablement rendu ces confessions plus touchantes, beaucoup moins stéréotypées.
Fort, de Catherine Anne (Texte publié par Actes Sud-Papiers) ; mise en scène de Pascale Daniel-Lacombe. Du 27 février au 10 mars 2009. Les lundis, mercredis et vendredis à 20h30 ; les mardis, jeudis et samedis à 19h30. Théâtre de l’Est parisien, 159, avenue Gambetta, 75020 Paris. Réservations au 01 43 64 80 80.