La Terrasse

"La culture est une résistance à la distraction" Pasolini

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YVES BEAUNESNE

YVES BEAUNESNE - Critique sortie Théâtre
« Claudel réinvente le vers et casse la construction française classique. »

Publié le 10 septembre 2007

LE VERS CLAUDÉLIEN ENTRE
SUFFOCATION ET DILATATION

SELON LE METTEUR EN SCÈNE YVES BEAUNESNE, CLAUDEL CESSE D’IMAGINER
QUE L’AMOUR SERAIT DU CÔTÉ DE LA POÉSIE ET L’ARGENT DU CÔTÉ DE LA
PROSE ET INVENTE LEUR CONCILIATION.

Comment situer L’Échange dans l’oeuvre de Claudel ?
Yves Beaunesne :
Claudel écrit sa pièce en arrivant aux États-Unis. Pour la première fois, il vit un exil, nourri à la fois du désir de rester et du désir de partir, et invente pour la scène des figures contradictoires, des compositions intimes de lui-même. L’action se situe sur une plage des Etats-Unis, au bord de l’Atlantique, entre l’ancien et le nouveau, entre le liquide et le solide. C’est sur ce terrain que Claudel plante ses quatre personnages qui racontent l’état du monde. Dès son premier poste, Claudel prend faits et causes, par le biais de l’écriture, pour les nations colonisées dont les cultures sont malmenées par les Blancs de la vieille Europe.


L’auteur propose d’autres rapports entre l’amour et l’argent.
Y . B . :
À partir du moment où le couple accède à un rapport sain à l’argent, l’histoire d’amour peut grandir. Claudel, issu d’une famille modeste, connaît la valeur de l’argent. Les hommes d’affaires et leur manière de poser les choses clairement exercent sur lui une certaine fascination. Le banquier

« Claudel réinvente le vers et casse la construction française classique. » Yves Beaunesne

Thomas Pollock Nageoire – un homme qui semble résumer la vie à des additions et à des soustractions – peut séduire Marthe, au fur et à mesure que s’ouvre le regard de la jeune fille, catholique panthéiste à la façon de Saint-François.

La versification casse les certitudes de la phrase en marche.
Y. B. :
Claudel prend ses distances, il réinvente le vers avec ses enjambements et casse la construction française classique. Le sens des mots est continuellement mis en péril par cette versification, dans une dialectique qui permet de révéler le sens profond de l’oeuvre. Par la respiration, le vers nous fait passer de la certitude au doute agissant, une transformation qui opère une dilatation et une suffocation intérieures, comparables
à l’effet du vin.

Propos recueillis par Véronique Hotte


L’Échange, de Paul Claudel ; mise en scène d’Yves Beaunesne. Du 23 au 27 janvier 2008.

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