La Terrasse

"La culture est une résistance à la distraction" Pasolini

Focus -285-Le Festin - Compagnie Anne-Laure Liégeois : le théâtre comme fête et comme partage

Une offre d’enrichissement pour les spectateurs

Une offre d’enrichissement pour les spectateurs - Critique sortie Théâtre Paris Le Festin - Compagnie Anne-Laure Liégeois
(© DR) : La metteuse en scène Anne-Laure Liégeois, fondatrice et directrice artistique de la Compagnie Le Festin.

Entretien / Anne-Laure Liégeois

Publié le 24 février 2020 - N° 285

C’est après des études de Lettres anciennes et la traduction du Festin de Thyeste, de Sénèque, qu’Anne-Laure Liégeois fonda la compagnie Le Festin. Celle qui fut la directrice du Centre dramatique national d’Auvergne, de 2003 à 2011, défend la conception d’un théâtre offert au plus grand nombre.

Quelles sont les origines de votre passion pour le théâtre  ?

Anne-Laure Liégeois : Elle vient de mes parents, qui étaient des fous de théâtre. J’ai commencé à le pratiquer au sein d’ateliers organisés par le Théâtre du Campagnol. Cette expérience a nourri en moi l’idée d’un théâtre de partage. Puis, après avoir fondé ma compagnie, j’ai mis en scène Le Fils de Christian Rullier, un spectacle déambulatoire avec 50 comédiens qui se jouait dans des usines désaffectées.

Imaginer de nouvelles formes de représentation a toujours été important pour vous…

A.-L. L. : Oui, j’ai toujours eu envie de repenser le rapport du public au spectacle, tout en affirmant une relation à la fête. Cela afin d’être ensemble, d’offrir le théâtre. Bernard Dort disait qu’il ne doit jamais y avoir d’humiliation par le théâtre. Pour moi, c’est une chose essentielle. Le théâtre doit toujours être une offre d’enrichissement pour les spectateurs.

Par quoi cette ambition passe-t-elle ?

A.-L. L. : D’abord, par une grande lisibilité des textes, ce qui ne veut pas dire une simplification. Il ne faut pas enlever du mystère ou de la poésie. Mais j’ai besoin que les messages politiques, citoyens, humains des textes dont je m’empare soient transmis avec clarté.

Ce qui rejoint le rapport intime que vous entretenez avec les mots, avec la langue…

A.-L. L. : Absolument. Ainsi qu’avec les auteurs. J’essaie d’être au plus près de l’humanité des auteurs, comme j’essaie d’être au plus près de ma propre humanité et de celles des acteurs. Et ensuite, de celle des spectateurs. Mais au final, toutes ces humanités se relient les unes les autres pour ne former qu’une seule et même humanité.

« L’espace qui se dégage entre le mot et sa réalisation scénique est l’espace de la poésie. »

Comment votre travail de direction d’acteurs s’organise-t-il ?

A.-L. L. : Ma première tâche, c’est la compréhension absolue des mots de l’auteur. Y compris dans les décalages poétiques qu’ils impliquent. Il y a le mot avec son sens, sa chair. Ensuite, je le décale en fonction de ma propre réalité, de mon univers intime et de la façon dont le monde joue sur lui. L’espace qui se dégage entre le mot et sa réalisation scénique est l’espace de la poésie. La poésie des corps, du phrasé, de la voix, du rythme…

D’où vient la relation privilégiée qui vous unit aux écritures contemporaines ?

A.-L. L. : Elle est liée au fait que ces écritures sont dans le vivant, que les auteurs qui les imaginent sont là, dans le même monde que nous, sous le même ciel, respirant le même air. Et puis, mettre en scène des auteurs contemporains, c’est une responsabilité par rapport à notre époque. Ces artistes doivent vivre. Il faut les faire travailler.

Qu’est-ce qui vous a décidée à porter à la scène Des Châteaux qui brûlent, le roman d’Arno Bertina ?*

A.-L. L. : Il y a, dans ce texte, exactement tout ce que j’aime. D’abord une langue incroyablement belle. Et puis, c’est un roman ancré dans le monde d’aujourd’hui. Il raconte la séquestration d’un secrétaire d’État par les salariés d’une usine de poulets placée en liquidation judiciaire. Des Châteaux qui brûlent parle de la douleur au travail, ainsi que des relations qui unissent les êtres. Ce roman est exactement ce qu’est le théâtre : une bulle de vie intense et transcendée. Tous ses personnages vivent une histoire de passions folles. C’est vraiment magnifique.

 

Manuel Piolat Soleymat

 

* Création en novembre 2021.

A propos de l'événement

Le Festin - Compagnie Anne-Laure Liégeois
27 rue Saint-Maur, 75011 Paris.

www.lefestin.org.

contact@lefestin.org

x

Suivez-nous pour ne rien manquer sur le Théâtre

Inscrivez-vous à la newsletter

x
La newsletter de la  Terrasse

Abonnez-vous à la newsletter

Recevez notre sélection d'articles sur le Théâtre