La Terrasse

"La culture est une résistance à la distraction" Pasolini

Focus -257-Andy Emler

Tour d’horizon de la rentrée du pianiste, compositeur et leader.

Tour d’horizon de la rentrée du pianiste, compositeur et leader. - Critique sortie Jazz / Musiques Cité de la musique et de la danse
© Jeff Humbert Andy Emler

Entretien Andy Emler

Publié le 20 août 2017 - N° 257

Votre actualité « jazz » reste cet album  « Running Backwards », si bien accueilli depuis sa sortie…

Andy Emler : Le point de départ initial est l’existence du trio que nous formons avec Claude Tchamitchian (contrebasse) et Eric Echampard (batterie). L’autre point de départ, c’est le guitariste Marc Ducret. On est tous vraiment proches depuis longtemps. Je me suis dit qu’il y avait quelque chose d’indispensable à nous retrouver tous les quatre ensemble. Dans cette musique, il y a beaucoup d’écriture, et même une écriture difficile. Il s’est avéré que cette complexité a abouti à quelque chose qui a surpassé mon espérance. Ce quartet était incontournable. C’est un peu comme s’il devait arriver.

Un autre temps fort de votre rentrée sera la création d’une nouvelle partition au titre intriguant : « Séquences en série pour 3 brigands ».

A. E. : Après une première création il y a 2 ans, le Festival Musica m’a transmis une nouvelle commande en me demandant d’écrire une musique sur des films muets, extraits des deux séries réalisées par Louis Feuillade dans les années 1910. C’est un travail colossal car dans un film muet la musique ne s’arrête pratiquement jamais. On sera trois à la jouer : Marc Ducret à la guitare, Claude Tchamitchian à la contrebasse et moi-même au piano. Improviser sur l’image m’est assez familier mais c’est la première fois que je compose la musique d’un film muet. C’est très intéressant : il faut trouver le compromis entre une musique qui fonctionne avec l’image, et qui réponde aussi à une situation de concert avec des musiciens sur scène face au public… Il y a une fluidité à trouver. Il y aura bien sûr de l’improvisation, mais délimitée, avec des règles du jeu strictes.

 

« Il y a encore des mentalités à faire bouger. »

Une nouvelle création cet hiver, le 2 février 2018, vous ramènera à un instrument que vous aimez beaucoup et sur lequel on vous entend de plus en plus souvent : l’orgue.

A. E. : Radio-France m’a passé commande pour son nouvel orgue. Ils ont construit un instrument absolument ahurissant avec des possibilités qu’on n’avait encore jamais vues sur un orgue à tuyaux. La musique sera interprétée par le saxophoniste Dave Liebman et moi-même à l’orgue.

Vous êtes désormais attendu et entendu sur les scènes les plus prestigieuses de la « musique classique ». Vous semblez de mieux en mieux compris.

A. E. : Peut-être, mais je me heurte régulièrement aussi à des portes encore bien fermées. On me dit encore très souvent, dans les festivals de jazz où je propose « My Own Ravel », d’aller jouer à La Roque d’Anthéron, et, dans les festivals classiques ou les églises pour les concerts d’orgue, on me dit que j’ai l’image d’un musicien de jazz ! Au bout du compte cette diversité, mon identité plurielle, restent extrêmement difficiles à vendre. Royaumont, Radio-France, Musica, l’Orchestre National de Lille ou les Traversées de Noirlac, autant de maisons où j’ai eu la chance de faire entendre ma musique récemment, restent encore des exceptions, des précurseurs… Comme disait Pierre Desproges, il faut expliquer aux français que l’ouverture d’esprit n’est pas une fracture du crâne ! Mais il est vrai que j’ai écrit énormément de musique que l’on m’a commandée depuis 5 ans. Et j’ai encore des rêves.

Lesquels ?

A. E. : Berio a écrit une série de Sequenzas pour instruments solistes, moi je rêverais volontiers d’une série de 5 concertos sur dix ans, pour des solistes incontournables issus du monde de l’improvisation, mais qui ont aussi une forte culture classique. Des artistes incroyables comme le guitariste Marc Ducret ou le clarinettiste et saxophoniste Laurent Dehors. Je voudrais que le monde classique s’intéresse à ces gens-là. Il y a des orchestres symphoniques dans le monde entier qui seraient heureux de découvrir et de s’emparer de nos musiques. Il y a encore des mentalités à faire bouger. Et tant mieux finalement !

 

 

Propos recueillis par Jean-Luc Caradec

A propos de l'événement

« Séquences en série pour 3 brigands » : création au Festival Musica
du mardi 3 octobre 2017 au vendredi 20 octobre 2017
Cité de la musique et de la danse
1 Pl. Dauphine, 67100 Strasbourg, France

Mardi 3 octobre à 20h30. Tél. 03 88 23 47 23.

Et aussi :

Arsenal de Metz, 57000 Metz.  Samedi 7 octobre à 20h. Tél. 03 87 74 16 16.

Le Triton, 11 bis, rue du Coq Français, 93260 Les Lilas. Vendredi 20 octobre à 20h. Tel. 01 49 72 83 13.

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