La Terrasse

"La culture est une résistance à la distraction" Pasolini

Focus -213-Les Gémeaux ~ Scène Nationale

(The Little Foxes) La Vipère

(The Little Foxes) La Vipère - Critique sortie Théâtre Sceaux Les Gémeaux
photo: Thomas Ostermeier

De Lillian Hellman / mes Thomas Ostermeier

Publié le 23 septembre 2013 - N° 213

Thomas Ostermeier, directeur de la prestigieuse Schaubühne de Berlin et fidèle invité des Gémeaux, tacle la cupidité effrénée de notre époque autant que la soumission des femmes, coincées dans les conventions bourgeoises.

Un art pour ici et maintenant : le théâtre selon Thomas Ostermeier ne verse pas dans l’esthétisme frigide mais en découd avec le présent, fouille les fissures qui rongent les chairs en silence sous le vernis souriant des apparences. « Je conçois en effet la mise en scène comme une exploration du réel qui révèle ce qui se joue au-delà de l’image superficielle. En ce sens, le réalisme consiste à dévoiler l’intériorité masquée derrière la façade. Si mon approche scénique utilise des effets de réel et s’appuie sur un langage réaliste dans un espace concret, elle tente de restituer la perspective intérieure des personnages, la façon dont ils vivent les situations. » explique le directeur de la Schaubühne de Berlin. Qu’il mette en scène des textes contemporains ou des classiques du répertoire, il situe l’action de plain-pied avec les spectateurs, pour leur renvoyer l’image de ce qu’ils sont, loin des clichés retouchés de ce qu’ils imaginent ou voudraient être. C’est dans le décor design de cossues maisons bourgeoises qu’il dévoile les schémas de pensée incrustés à coups d’évidences, les peurs ravalées et les mécanismes sociétaux qui chaque jour broient tranquillement l’humanité commune et gangrènent l’être au plus intime.

Symptôme de notre époque

Avec La vipère (The Little Foxes), de Lillian Hellman (1905-1984), le metteur en scène allemand tacle la passion dévorante de l’argent qui finit par tuer autant que la domestication des femmes, assignées à résidence dans le rôle d’épouse soumise. Immortalisée en 1941 par Bette Davis dans le film de William Wyler, Régina, épouse d’un riche banquier, ourdit une machination pour soutirer à son mari le capital qui lui permettrait d’investir dans une opération financière et de gagner son indépendance. « Elle rêve d’une vie autonome, loin de sa province monotone, qu’elle n’a jamais quittée, loin de son mari, Horace, malade du cœur, dont elle dépend, loin de la nostalgie aristocratique de sa belle-sœur Birdie, qui noie ses désirs ardents et ses ressentiments larmoyants dans l’alcool, explique Florian Borchmeyer, dramaturge. Loin de tailler ce personnage en monolithe monstrueux, Thomas Ostermeier en fait le symptôme d’une société où la promesse du bonheur reste attachée aux valeurs de l’argent.

 

Gwénola David

A propos de l'événement

(The Little Foxes) La Vipère
du jeudi 27 mars 2014 au dimanche 6 avril 2014
Les Gémeaux
49, avenue Georges Clemenceau 92330 Sceaux

Du 27 mars au 6 avril 2014, à 20h45, le dimanche à 17h, relâche lundi, mardi et mercredi. A lire : Thomas Ostermeier, entretien avec Sylvie Chalaye, éditions Actes Sud-Papiers. Tél : 01 46 61 36 67. www.lesgemeaux.com
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