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"La culture est une résistance à la distraction" Pasolini

Focus -202-Comédie de Béthune

Roulez vieillesse !

Roulez vieillesse ! - Critique sortie Théâtre Béthune La Comédie de Béthune
Crédits photos : DR

ENTRETIEN THIERRY ROISIN
Caramba ! / conception de Thierry Roisin et Olivia Burton / mes de Thierry Roisin

Publié le 1 octobre 2012 - N° 202

Le directeur de la Comédie de Béthune, à la tête d’une maison en très grande forme, a choisi cette saison de travailler sur la vieillesse. Un thème dérangeant pour un spectacle éclairant et lucide.

 « Notre inscription territoriale et nationale est solide. »

Pourquoi choisir de travailler sur la vieillesse ?

Thierry Roisin : Parce que c’est une question qui est en train de devenir majeure. On n’a sans doute pas encore assez mesuré comment l’allongement de la durée de la vie va changer la société en profondeur. Au départ, je voulais revenir, avec ce nouveau spectacle, à une question de société, ni poétique ni littéraire. Pour écrire le texte, j’ai constitué deux groupes de travail, l’un à Béthune et l’autre à Paris, avec des gens de plus de soixante-cinq ans. On les a fait travailler sur une question : comment s’adresse-t-on à vous ? Quelles sont les paroles qui vous blessent, qui vous choquent, qui vous font rire ?

Qu’ont-ils répondu ?

T. R. : Le propos est vindicatif. Les vieux que nous avons interrogés ne sont pas très satisfaits de la place qu’on leur accorde ni de la façon dont on leur parle ! D’où le titre : Caramba !, comme un cri de colère. Aujourd’hui, si on n’est pas en bonne santé, un peu riche et bien entouré, ça devient très compliqué de vieillir. Evidemment on met en avant des gens comme Hessel, ou des communautés de vieux qui inventent une nouvelle façon de vivre ensemble, mais il reste une majorité insatisfaite à qui on ne donne pas la parole. Ce qui ressort principalement, c’est l’évitement. Malgré les bonnes intentions, on a du mal à entretenir des relations simples et directes avec les vieux : soit on est dans l’excès d’admiration, soit on focalise sur les problèmes liés au corps. Par ailleurs, il y a une difficulté propre à l’époque : une communauté de gens âgés qui répond à des codes établis est désormais rejointe par une autre, celle qui a fait 68 et qui s’est construite sur des valeurs rebelles de jeunesse magnifiée et exaltée. Tout cela produit de la confusion.

Quelle forme le spectacle va-t-il adopter ?

T. R. : Une forme particulière avec un côté performance. D’abord une sorte d’oratorio, puis une partie sans paroles, comme la traversée d’une allée du purgatoire, lieu où tous les débordements sont permis, où toutes les normes imposées par la société vont être levées. La deuxième partie sera une radiographie très intime de moments de vie liés à la vieillesse. Il s’agit de soulever le voile sur un endroit où les a priori sont encore très forts. Il y a beaucoup d’idées reçues sur la vieillesse. Molière est très présent dans notre imaginaire : on se représente les vieux comme des barbons incapables de comprendre les générations qui les suivent.

Où en est La Comédie de Béthune en ce début de saison 2012-2013 ?

T. R. : On a connu, avec la saison qui s’achève, la plus forte fréquentation depuis huit ans. Le nombre des abonnés est en hausse. Mais il n’y a pas que la quantité qui compte ! On essaie de faire un théâtre exigeant et accessible, qui parle aux gens, avec, je pense, une vraie cohérence, et ça marche ! Il y a une vraie curiosité et le public en redemande ! Nous avons réussi à entrer dans une continuité équilibrée par rapport à l’an dernier, où nous avions bénéficié de capacités de production élargies. Les spectacles que nous avons créés rayonnent à l’extérieur et tournent beaucoup. Bref, ça va très bien ! Au bout de huit ans, je me rends compte que quelque chose a pris avec le public et que notre inscription territoriale et nationale est solide. Nous accueillons plein d’artistes formidables, qui ont plein de choses à dire, et dont le public a besoin. Partager un questionnement, découvrir une esthétique : ça rentre dans la vie des gens. Et c’est formidable !

Propos recueillis par Catherine Robert

A propos de l'événement

Caramba !
du mardi 15 janvier 2013 au vendredi 25 janvier 2013
La Comédie de Béthune
138, rue du 11 novembre, BP 631 Béthune cedex
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