Requiem pour un son

On le sait déjà pianiste, leader du MegaOctet, et de plus en plus compositeur autonome, mais on aurait tort de s’étonner de le découvrir organiste, aux pupitres de ces instruments majestueux qui habitent nos églises, souvent dans le silence. A la question : « Comment êtes-vous devenu compositeur ? », Andy Emler ne nous avait-il pas déjà répondu « Tu es gamin, tu apprends à jouer du piano avec la dernière descendante d’une famille d’organistes, tu improvises, elle se marre, elle aime bien, et tu commences à rédiger des impros… Je pense que ça a commencé de cette façon… », rappelant ainsi au passage sa filiation musicale directe et marquante avec Marie-Louise Boëlmann-Gigout (1891-1977), grande personnalité de l’orgue en France. Déjà entendu maintes fois sur l’orgue Cavaillé-Coll de l’abbaye de Royaumont, Emler organiste semble ouvrir sur cet instrument grandiose une voix inédite, quelque part dans un grand chant des possibles entre Olivier Messiaen et Miles Davis, où une certaine idée de l’improvisation, une pulsation singulière et solaire, se donnent à entendre, en solitaire, mais parfois aussi dans le dialogue avec la voix. Ici celle du basque Beñat Achiary, complice de longue date, improvisateur et chantre merveilleux de l’oralité et de la musique de l’instant.

J.-L. Caradec