Relectures d’aujourd’hui avec Aquaserge et Spirito

Il y a le son et ce qu’on en fait. Aquaserge, c’est d’abord un son rock, qui se dessine autour de la basse d’Audrey Ginestet. Mais cet « autour » prend peu à peu de plus en plus de place. Comme d’autres formations — et possibles influences — avant eux (autour de Robert Wyatt, Frank Zappa, John Zorn ou Fred Frith par exemple), ces virtuoses jamais en panne d’idées musicales (souvent plusieurs dans un même morceau) jouent à déboussoler les genres. S’ils peuvent emmener ailleurs une chanson de Léo Ferré (Si tu t’en vas) ou un standard de jazz (My funny Valentine), pourquoi ne s’attaqueraient-ils pas aux avant-gardes de la musique dite savante ?

Déboussoler les genres

« Perdu dans un étui de guitare », leur nouveau projet, est un concert composé où se retrouvent les notes et l’esprit de György Ligeti, Giacinto Scelsi, Morton Feldman ou Steve Reich, mais parés des couleurs du nonette (guitares, claviers, vents, percussions). Leur Varèse (Un grand sommeil noir) est plus varésien que nature, et le tout semble réécrit sous l’œil ironique de John Cage. L’idée que toute relecture est aussi réécriture est aussi à l’œuvre avec le Chœur Spirito de Nicole Corti. Le programme « Cori, féminin pluri-elles », consacré aux compositrices, de Barbara Strozzi et Élisabeth Jacquet de la Guerre à Betsy Jolas, Graciane Finzi et Édith Canat de Chizy, croise les inspirations poétiques et les inventions musicales — les parties instrumentales étant ici audacieusement et intelligemment confiées au duo d’accordéons Xamp.

Jean-Guillaume Lebrun