Venezuela d’Ohad Naharin et la Batsheva Dance Company
Venezuela est une pièce magistrale d’Ohad [...]
Focus -291-Chaillot - Théâtre national de la Danse
Le chorégraphe franco-belge Damien Jalet main dans la main avec le scénographe japonais Kohei Nawa livre un nouveau chapitre de leur cosmogonie poétique inspiré de la mythologie japonaise, où se mêlent science et questionnement existentiels.
Planet [wanderer] est la deuxième pièce que vous concevez avec Kohei Nawa. S’inscrit-elle dans la continuité de Vessel, créé en 2015 ?
Damien Jalet : Vessel était la première étape d’un dyptique. Il évoquait deux niveaux de Kojiki, une cosmogonie japonaise, qui commençait dans les enfers – Yomi – et continuait dans le ciel – Takama-ga-hara. Planet reprend les choses là où nous les avions laissées : la création d’un homme, qui est sur le point de naître. Planet explore le monde intermédiaire entre le haut et le bas, appelé Ashihara-no- Nakatsukuni ou « la terre centrale des roseaux », qui est là où nous vivons. Avec Kohei, on a aussi pensé ces deux pièces comme des opposés : Vessel est liquide et aborde la limite entre humain et non humain, alors que Planet est sec et beaucoup plus incarné, grâce à des danseurs aux physiques et aux techniques très différents.
Qu’évoque Planet [wanderer], le titre de la pièce ?
D.J. : C’est Kohei Nawa qui a proposé ce titre, puis j’ai cherché son étymologie : Planàomai qui en grec signifie « errer ». Il y avait quelque chose de très beau dans cette idée de migration constante. Elle est d’ailleurs inhérente à l’univers, aussi bien au niveau des planètes et du cosmos que des cellules. L’errance évoque la manière dont fonctionne toute chose : constamment en train de changer, de se métamorphoser, jamais stable !
Cette pièce mêle encore une fois les arts plastiques et la danse, comment faites-vous dialoguer ces deux pratiques?
D.J. : Nous explorons la fusion des corps avec ces différents éléments, ce qui change le rapport à la gravité. Cela crée une alchimie poétique qui ramène les corps à ce qu’ils sont : de la matière animée. Cette fusion nous rappelle à notre fragile matérialité. C’est un travail extrêmement précis et complexe, mais j’aime pousser la danse dans une forme de limite, pour arriver à un point où la technique et le talent des interprètes se confondent avec quelque chose dont ils ne sont plus vraiment conscients.
Est-ce aussi une manière de mettre en lumière la vulnérabilité humaine ?
D.J. : Oui, j’aime beaucoup travailler sur ce qui nous dépasse et que l’on ne peut pas contrôler, comme la respiration ou le subconscient. En cela, la crise que nous traversons est une vraie leçon d’humilité ! Alors que notre civilisation s’est développée sur l’exploitation des ressources et la domination de la nature, la prise de conscience de la crise écologique est une perte de contrôle, qui nous permet d’éprouver notre vulnérabilité. Il y a aussi de la beauté dans cette fragilité.
Propos recueillis par Belinda Mathieu
à 20h30, le jeudi à 19h30. Relâche les lundi et dimanche.
Tél : 01 53 65 30 00.
Venezuela est une pièce magistrale d’Ohad [...]