La Terrasse

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Philippe Fénelon

Philippe Fénelon - Critique sortie Classique / Opéra

Publié le 10 mai 2009

Composer en toute indépendance

Ni post-sériel, ni néo-tonal, le compositeur Philippe Fénelon se situe à l’écart des courants. La Péniche Opéra lui consacre une carte blanche, avec notamment la commande d’une œuvre interrogeant le rapport entre musique et philosophie.

Comment voyez-vous la relation entre musique et philosophie ?
 
Philippe Fénelon : Le lien entre musique et texte me tient particulièrement à cœur. Mais en ce qui concerne le rapport entre musique et philosophie, c’est plus complexe. Je ne pense pas que la musique puisse transcrire une pensée. Dans le cadre de la série organisée par La Péniche Opéra sur le thème « Musique et philosophie », on m’avait proposé de mettre en musique des textes philosophiques, mais j’ai préféré faire un texte moi-même, mettant en scène un compositeur qui se voudrait philosophe ! Cette œuvre est écrite pour baryton et piano, avec également l’emploi d’un tambour-jouet.
 
Quelle relation entretenez-vous avec la voix ?
 
P.F. : Au début de ma carrière, j’ai étudié le chant et j’ai surtout accompagné beaucoup de chanteurs au piano. Mais je ne pensais pas écrire autant pour la voix ! Je crois que c’est le médium le plus direct pour être en relation avec l’auditeur. Dans les années 70 et 80, j’écrivais des pièces « pyrotechniques » pour la voix, dans un style plutôt expérimental. C’est notamment le cas de Prétexte, écrit en 1982, qui sera également donné au concert de La Péniche. Dans cette œuvre, la chanteuse improvise beaucoup et crée elle-même la structure de la pièce. Mais je laisse maintenant ce type d’écriture à des compositeurs comme Georges Aperghis ou Maurizio Kagel. J’ai donc préféré écrire davantage dans un style « chantable » par les grandes voix d’opéra.
 
Parlez-nous de Notti également au programme de votre carte blanche de La Péniche…
 
P.F. : J’ai écrit cette pièce pour la contrebassiste Joëlle Léandre, qui l’a jouée dans le monde entier. Je connais cette grande artiste depuis 40 ans. J’aime sa manière de prendre des risques, de jouer avec des musiciens de tous horizons. C’est l’une des rares artistes engagées de la musique contemporaine.
 
« le public est intelligent : ce n’est pas la peine de lui donner ce qu’il entend à la télévision. »
 
Quelle relation entretenez-vous avec La Péniche Opéra ?
 
P.F. : Cela faisait 20 ans que Mireille Larroche me demandait d’écrire une pièce pour La Péniche. Mais je n’aime pas me forcer à faire des projets auxquels je ne crois pas sur le moment. L’année dernière, j’en ai eu l’envie. Alors que je travaillais sur des grandes formes, j’ai eu besoin de m’exprimer dans un genre plus réduit. J’admire le courage de Mireille Larroche qui réussit à faire une si belle programmation avec des moyens parfois limités.
 
Vos opéras sont donnés sur les plus grandes scènes, de l’Opéra de Paris au Bolchoï. Etes-vous un compositeur « institutionnel » ?
 
P.F. : J’ai toujours été indépendant. Je n’ai jamais eu la moindre responsabilité dans des structures. C’est sans doute pour cela que des personnalités aussi différentes que Gérard Mortier, Nicolas Joël ou Stéphane Lissner m’ont passé commande. Je n’appartiens à aucune école. Si je veux écrire de la musique répétitive ou en do majeur, je le fais ! Ce qui est sûr, c’est que le public est intelligent : ce n’est pas la peine de lui donner ce qu’il entend à la télévision.
 
Outre vos activités de compositeur, vous réalisez des films…
 
P.F. : J’en suis à mon quatrième film. Les compositeurs-cinéastes sont assez rares ! Dans la manière de cadrer ou dans la structure du montage, il y a un lien avec la composition. La musique reste mon activité primordiale. Je prépare actuellement deux pièces pour ensemble vocal. Et l’Opéra de Paris m’a commandé pour la saison 2010/11 un opéra dont le livret sera basé sur le troisième acte de La Cerisaie de Tchekhov.
 
Propos recueillis par Antoine Pecqueur


Lundi 11 mai à 20h30. Places : 17 €.

A propos de l'événement



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