Pascal Contet, l’accordéon populaire et savant

Les compositeurs écrivent les œuvres, mais ce sont les interprètes qui créent le répertoire. En 1993, quelle place l’accordéon a-t-il dans le champ de la musique contemporaine ? En France, aucune ou quasiment. Ce n’est pas le cas en Scandinavie ou dans le monde germanique où Pascal Contet se forme. Il y trouve sa vocation : servir la musique de son temps, être le « miroir des compositeurs », qu’il n’hésite pas à démarcher ; Jean Françaix, octogénaire en marge des courants en vogue, dédie son concerto à ce jeune trentenaire. Suivront quelque trois cents pièces, vaste éventail esthétique. En trente ans, comme soliste ou au sein des ensembles dédiés à la création – tels 2e2m et Ars Nova – Pascal Contet a familiarisé de nombreux compositeurs à l’accordéon, contribuant ainsi à faire évoluer leur propre langage.

Complicités au long cours

Il noue des complicités au long cours, comme avec la contrebassiste Joëlle Léandre avec qui il improvise depuis plus de vingt-cinq ans. Parallèlement, il approche des univers sonores nouveaux : ce sont par exemple les sons mêlés de l’accordéon et de l’orgue à bouche sheng qu’explore la collaboration avec Wu Wei, qui donnera lieu à la création d’un Double Concerto du Coréen Donghoon Shin (en Allemagne puis en Corée, reprise avec l’Orchestre national de Bretagne en 2024). Il dialogue avec des chorégraphes, des vidéastes, des acteurs, des metteurs en scène… Et l’interprète qui a joué depuis trente ans à travers le monde ne s’adresse pas qu’à un public restreint. En témoignent un programme autour du tango (enregistré chez Aparté), un autre autour de la chanson française ou encore D’autres mondes, spectacle conçu avec Thierry Coduys, compositeur-concepteur d’espaces sonores, qui revisite l’héritage électro-acoustique puis s’achève en dancefloor. Collectionneur d’instruments – son musée personnel, qu’il présente sous forme d’exposition itinérante, compte plus de quatre-vingts accordéons –, Pascal Contet sait en conter l’histoire, savante et populaire.

Jean-Guillaume Lebrun