OLIVIER PY

Quels choix guident votre première saison à l’Odéon ?
Olivier Py : Georges Lavaudant et ses collaborateurs avaient pris des contacts mais aucun contrat n’avait été signé, j’ai donc eu l’entière liberté de créer une saison qui soit mienne. La programmation s’efforce d’équilibrer Européens et Français ainsi que les metteurs en scène historiques et les plus jeunes. J’ai voulu aussi qu’il y ait des créations (il y en a huit au total) et que création et diffusion s’équilibrent. Je veux développer l’intérêt de l’Odéon pour les poètes : ainsi, en accueillant Claude Régy, on accueille aussi un auteur norvégien qui n’a pas quarante ans. Enfin, je m’efforce d’éviter la scission entre les Ateliers Berthier et l’Odéon.

Comment caractériser votre empreinte théâtrale?
O. P. : C’est l’adjectif populaire qui me correspond le mieux. Ce qui ne veut pas dire populiste ! Quand j’ai plongé dans le corpus vilarien l’an dernier pour un spectacle donné dans la Cour d’honneur, j’ai retrouvé l’idée d’un théâtre ni univoque ni unilatéral, sans racolage ni paternalisme. Si je n’avais pas confiance dans le désir de théâtre de toutes les couches de la société, je n’en ferais pas ! C’est en cela que la salle doit représenter la société et à cet égard il faut rompre avec cette image élitiste qui colle à la peau du théâtre : ce n’est ni l’élite financière ni l’élite intellectuelle qui vient au théâtre. Ce qui est incroyable, c’est que le théâtre est toujours sommé de démontrer sa légitimité et de prouver qu’il a des choses à dire sur le monde. Or le théâtre n’est pas vecteur d’opinion ! Qu’est-ce que le théâtre fait pour le monde ? Du théâtre !

Quelles actions concrètes comptez-vous mener dans cette perspective d’un théâtre populaire ?
O. P. : D’abord une politique volontariste de baisse des tarifs, notamment les tarifs réduits et les tarifs des abonnements. Je veux aussi que le théâtre joue son rôle dans la cité : multiplier les débats, les rencontres avec le public, les rencontres interprofessionnelles. Et l’édifice a un côté monument historique : je crois qu’on doit pouvoir arriver à y créer plus de convivialité.

Vous montez L’Orestie en fin de saison et reprenez les Illusions comiques en septembre.
O. P. : Oui et L’Orestie sans coupes ! La plupart du temps, on se débarrasse des Euménides et on appelle ça Les Atrides, ce qui est dommage car Les Euménides montre que la tragédie finit bien : c’est la partie positive et fortement politique de cette pièce qui montre comment la cité se construit, se met en place, quelle est la place des dieux dans l’organisation civique et quel contrat doivent passer le religieux et le politique. On a aussi l’habitude de couper le choeur : nous le conserverons aussi et le conserverons en grec ancien. Il y a tout dans cette oeuvre, véritable cosmogonie. L’affronter, c’est faire l’expérience de la totalité et revenir aux sources, ce qui est toujours bon dans une époque comme la nôtre d’effondrement du politique dans la mondialisation et la virtualité, d’enivrement et de trouble. Mais loin de se contenter de raconter la catastrophe, je crois que le théâtre doit retrouver le réel,

« Qu’est-ce que le théâtre fait pour le monde ? Du théâtre ! » Olivier Py

au sens où toute apocalypse est une révélation, comme l’indique son étymologie. Oui, le théâtre, c’est l’amour du réel. Quant à Illusions comiques, cette comédie à un moment de douleur ouvrira la saison en affirmant finalement déjà cette idée. Le théâtre doit prendre en charge le monde mais s’il n’est que politique, il n’a pas de sens. C’est le théâtre qui est en lui-même la solution.

Propos recueillis par Catherine Robert

Illusions comiques, texte et mise en scène d’Olivier Py. Du 20 au 30 septembre 2007. Théâtre de l’Odéon.
L’Orestie, d’Eschyle ; mise en scène d’Olivier Py. Du 15 mai au 21 juin 2008. Théâtre de l’Odéon.