Focus -261-Théâtre du Crochetan
Mener les spectateurs hors du monde…
Entretien / Lorenzo Malaguerra
Publié le 20 décembre 2017 - N° 261Il croit à un théâtre ouvert et poétique, un théâtre fondé sur l’acteur et la relation avec le public. Lorenzo Malaguerra revient sur son parcours et sur la complicité artistique qui le lie au comédien, metteur en scène et scénographe Jean Lambert-wild.
Quelle vision du théâtre a été à l’origine de la création de votre compagnie, Le Troisième Spectacle, au début de votre parcours ?
Lorenzo Malaguerra : J’ai fondé cette compagnie pour mettre en scène La Nuit juste avant les forêts, en 2001. Ce spectacle est, je crois, assez représentatif du théâtre qui m’intéresse : un théâtre d’acteurs qui s’adresse au public de manière forte et généreuse. Ce qui revient non seulement à donner une grande place à la parole des comédiens, mais aussi à leur corps. J’essaie de les amener à repousser leurs limites. Pour moi, ce qui est fondamental, c’est que l’acteur arrive sur le plateau en étant « hors de lui-même ». C’est-à-dire dans un état d’abandon par rapport à ce qu’il est en train d’interpréter. Le théâtre est une question de passion, d’émotions qui débordent. Ce sont ces débordements que je recherche chez les acteurs.
Depuis quelques années, vous signez régulièrement des mises en scène en association avec Jean Lambert-wild. Comment est née votre complicité ?
L. M. : C’est une histoire d’amitié qui s’est transformée en histoire de théâtre. Nos deux univers sont extrêmement complémentaires. Jean donne bien sûr beaucoup d’importance à l’écriture, mais étant scénographe, il a également la capacité d’élaborer des dispositifs originaux, de déplacer le théâtre vers des univers totalement improbables. Moi, je me concentre davantage sur l’art de l’acteur.
« J’arriverai par l’ascenseur de 22h43 puise à la fois à la source du rock et de la poésie. »
Diriez-vous que vous partagez une même idée du théâtre ?
L. M. : Oui, je crois. Pour Jean Lambert-wild comme pour moi, le théâtre est poétique. Il est avant tout une écriture et une langue. C’est cette matière qu’il faut mettre sur scène en proposant aux spectateurs une expérience singulière, une expérience qui les mène hors du monde. Nous nous sentons très loin du théâtre conceptuel. Nous cherchons bien sûr la modernité, mais en créant une communauté, en travaillant à réinventer la force d’un partage avec le public. Et puis, nous sommes tous les deux beaucoup influencés par d’autres disciplines des arts de la scène : la magie, le cirque, la comédie musicale, le cabaret… C’est vraiment quelque chose que Jean m’a apporté. Avant de le rencontrer, j’étais en quelque sorte un puriste du théâtre.
Quelle ligne de programmation défendez-vous à la tête du Théâtre du Crochetan ?
L. M. : Justement, j’essaie de construire une programmation faite de croisements. Les spectacles que nous présentons vont de propositions très exigeantes à des formes beaucoup plus populaires.
Vous créez, en ce début d’année, J’arriverai par l’ascenseur de 22h43, un monologue écrit et interprété par Philippe Soltermann…
L. M. : Oui, c’est un texte très original autour de l’univers musical de Hubert-Félix Thiéfaine. J’arriverai par l’ascenseur de 22h43 puise à la fois à la source du rock et de la poésie. L’idée de ce spectacle est de faire du Thiéfaine sans Thiéfaine, d’essayer de recréer au théâtre la puissance d’un concert. Cela, alors que Philippe Soltermann est seul sur scène, sans instrument, sans bande son, sans vidéo… Ce monologue interroge ce qui unit un fan à son idole. Il éclaire comment cette relation peut influencer le cours d’une vie.
Entretien réalisé par Manuel Piolat Soleymat
A propos de l'événement
J’arriverai par l’ascenseur de 22h43du vendredi 12 janvier 2018 au vendredi 9 février 2018
les 12 et 13 janvier 2018 au Théâtre Benno Besson à Yverdon-les-Bains, le 18 janvier aux Docks à Lausanne, du 1er au 3 février au Théâtre du Crochetan à Monthey, les 8 et 9 février à l’Usine à Gaz à Nyon.
Théâtre du Crochetan
9 avenue du Théâtre, 1870 Monthey, Suisse.
Tél. : 00 41 24 475 79 11.