La Terrasse

"La culture est une résistance à la distraction" Pasolini

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JOHANNES VON MATUSCHKA

JOHANNES VON MATUSCHKA - Critique sortie Théâtre

Publié le 10 novembre 2010

PENTHESILEE, OU LES DESORDRES POLITIQUES DU CŒUR

KLEIST S’EMPARE DU MYTHE DES AMAZONES ET REECRIT L’HISTOIRE DE CET AMOUR DEVORANT ENTRE PENTHESILEE ET ACHILLE, DUEL AMOUREUX SUBLIME ET BARBARE QUI CONTIENT « DES POUSSEES NOCTURNES DU SANG », SELON LES MOTS DE JULIEN GRACQ. JOHANNES VON MATUSCHKA A APPRIVOISE LA DEMESURE FLAMBOYANTE DE CETTE PIECE AVEC LES JEUNES ACTEURS ISSUS DE L’ECOLE SUPERIEURE DE THEATRE DU TnBA.

« La langue crée du malentendu » Johannes von Matuschka
 
Qu’est-ce qui se joue dans la relation d’Achille et Penthésilée ?
Johannes von Matuschka : Le tragique part d’une situation banale : deux êtres tombent amoureux. Mais cet état, assez commun, se greffe sur une structure archaïque posée par la mythologie qui pousse les sentiments à l’incandescence. Penthésilée, reine des Amazones, et Achille, chef de guerre des Grecs, sont des héros. L’un comme l’autre vit dans une société très figée qui exclut les émotions, impose des rapports et des rôles entre homme et femme très codifiés. Leur amour transgresse ces lois et provoque une crise politique. Le désordre des cœurs, le bouleversement personnel, mettent en crise l’organisation de la société et se prolongent dans la lutte guerrière.
 
Le titre « Penthésilée, à bout de souffle » évoque forcément le film de Godard. Quel écho entendez-vous avec la pièce de Kleist ?
J. M. : Godard raconte aussi un amour impossible… une tragédie grecque dans le quotidien des années 60. A bout de souffle renvoie également au subtil travail sur la langue à l’œuvre dans cette pièce. Kleist cherche un langage du cœur et montre l’impossibilité des mots à embrasser les tumultes intimes, complexes de l’être. « Les mots ne peuvent pas créer une langue de l’âme » écrit-il dans La cruche cassée. Achille et Penthésilée ne parviennent pas à s’exprimer par le verbe et parlent par leurs instincts. La langue crée du malentendu.
 
Comment avez-vous travaillé avec ce groupe de treize jeunes acteurs ?
J. M. : Les six femmes incarnent tour à tour Penthésilée, de même que sept hommes se glissent dans le rôle Achille. Le couple ainsi formé varie sans cesse, comme s’il ne parvenait jamais à se trouver, comme si un virus se propageait pour le désagréger. Ce travail demande une forte connivence du groupe et passe par des improvisations pour faire tomber les inhibitions, le regard sur soi, pour atteindre une réalité de l’engagement physique sur scène. En fait, je cherche toujours la personne derrière le personnage…

Entretien réalisé par Gwénola David


Penthésilée, à bout de souffle, de Kleist, mise en scène Johannes von Matuschka. Du 2 au 11 décembre 2011, à 20h (relâche dimanche et lundi).

A propos de l'événement



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