Jean-François Sivadier
©Crédit photo : Christophe Berthelot
Crédit photo : Christophe Berthelot
Publié le 10 octobre 2009
Le vertige de la légèreté
Jean-François Sivadier met en scène La Dame de chez Maxim comme une tempête métaphysique où la liberté théâtrale fait exploser les cadres de la langue et l’enfermement des rapports humains.
« Feydeau construit une machine à plaquer du mécanique sur de l’humain tellement sophistiquée que l’acteur a davantage à recevoir qu’à donner en l’interprétant : l’état d’électrochoc permanent le met dans un état de grâce, d’enfance, d’émerveillement, d’étonnement au monde. Les personnages ne reconnaissent plus le monde qui les entoure. Ils sont agis et dépassés par l’écriture. Comme Chaplin dérapant et tombant, Feydeau ne cesse de décrire des corps en chute. Il persécute ses personnages jusqu’à trouver sur leurs visages l’innocence et la bêtise. Feydeau rend la bêtise poétique. C’est une bêtise métaphysique, on peut s’en moquer mais elle nous concerne tous. Dès qu’on plaque dans notre comportement quelque chose qui n’est pas nous, on retrouve Feydeau, dans tout ce qui en nous peut devenir une mécanique contraignant le naturel.
Un appel à la liberté
J’essaie de rendre la pièce universelle et intemporelle, avec le souci de trouver comment le texte parle du théâtre et donc comment il parle du monde. Chez Feydeau, le couple est le cadre de départ du jeu et peu à peu, tous les cadres explosent. Tout le monde joue la comédie mais personne ne maîtrise le pouvoir : chez Feydeau, on ne peut pas prendre le pouvoir. Les personnages subissent énormément et sont pris dans le mécanisme social. Mais Feydeau ne se livre pas à une critique de la bourgeoisie et ne fait pas du théâtre politique. A l’intérieur de cadres très forts qui ont leurs lois et leurs psychoses, il crée du chaos. Dans La Dame de chez Maxim, le chaos arrive par une femme libre qui n’appartient à aucun cadre. Tous les grands textes de théâtre sont des appels à la liberté. Le souffle dionysiaque et libérateur de la Môme Crevette est exactement celui du théâtre. La Môme Crevette, c’est l’intuition de Feydeau : elle gène et fascine, exactement comme l’inspiration l’écrivain. »
Propos recueillis par Catherine Robert
La Dame de chez Maxim, de Georges Feydeau ; mise en scène de Jean-François Sivadier. Du 6 au 10 octobre 2009. Du mardi au samedi à 20h.