LE THÉÂTRE EN DÉMESURE DE KOLYADA
Après une tournée en Ile-de-France la saison dernière, le metteur en scène russe Nikolaï Kolyada présente sa version d’Hamlet aux Ateliers Berthier. Une version sauvage et insolite.
Un contexte de fête païenne. Un Moyen Age sans âge. Une éternité primitive du théâtre… L’univers auquel appartient la version d’Hamlet mise en scène par Nikolaï Kolyada se situe au cœur de l’identité artistique de ce metteur en scène, auteur et comédien russe vivant à Ekaterinbourg. Nikolaï Kolyada conçoit l’art dramatique comme une « une expérience vitale, concrète, au plus près des paysages, des matériaux, des atmosphères de la Russie d’aujourd’hui ». Pauvres en moyens mais riches en images et en énergie, saturant le plateau d’objets hétéroclites glanés à l’occasion de promenades dans les quartiers d’Ekaterinbourg ou au marché Chartachki, les créations du metteur en scène s’attachent, selon ses propres mots, à « dire la beauté des poubelles ». Une beauté qui s’appuie sur le théâtre pour transcender les détritus et les salissures que charrient nos sociétés contemporaines.
Un Hamlet aux impulsions débridées
Ainsi, dans ce spectacle aux allures de bric-à-brac shakespearien, toutes sortes d’influences se mélangent et se contaminent pour donner corps à une représentation au sein de laquelle Nikolaï Kolyada, travesti en ange dérisoire, interprète le rôle du spectre venu soulever le corps d’Ophélie. Quant à Oleg Yagodine, l’acteur fétiche du metteur en scène, il campe un Hamlet aux impulsions débridées, un Hamlet sauvage, traversé par toute la véhémence de ses fureurs et de ses exaltations. Les troubles du monde et de l’âme humaine sont investis sans aucun souci de tempérance. Car c’est un théâtre brut, farouche, pléthorique, un théâtre de la démesure auquel travaille depuis plus de vingt ans Nikolaï Kolyada. Un théâtre qui a pour dessein de transporter l’assistance des rires aux larmes. « On ne peut pas commencer par pleurer, confie-t-il. Au début, le spectateur doit se croire très libre et, à la fin, il faut l’abattre. Tous mes spectacles disent cela. »
Hamlet, de William Shakespeare ; mise en scène Nikolaï Kolyada. Du 7 au 16 octobre 2010. Ateliers Berthier.