Et aussi en musique
Le Quatuor Ludwig joue Beethoven, [...]
Focus -203-Automne en Normandie
Traversant l’œuvre de Lewis Carroll, Fabrice Melquiot plonge dans la Chine d’aujourd’hui et compose un « cirque-poème » avec la troupe acrobatique de Tianjin.
Que trouve l’écrivain hors du royaume des mots ?
Fabrice Melquiot : Je laisse souvent les accidents choisir pour moi. Le hasard, ça s’écoute. Et ça peut mener un auteur de théâtre à écrire du silence. Depuis quelque temps, je me laisse emmener et ça réveille, ça élargit l’horizon, ça ouvre le geste. Et puis l’écriture pour le théâtre contient espace, corps et mouvement. Le royaume, c’est la scène. Mais ce n’est pas un royaume. Plutôt un espace de nature sauvage.
Comment avez-vous travaillé à partir de l’œuvre de Lewis Carroll ?
F. M. : Quand Brigitte Gruber, une amie de vingt ans, m’a invité à participer au projet, j’ai rencontré les acrobates de l’Académie de Tianjin. Une fois déterminés les interprètes et leurs spécialités, j’ai écrit un canevas dramaturgique qui réponde à une transposition de l’histoire d’Alice dans la Chine d’aujourd’hui, celle des villes tentaculaires, terrier du lapin à ciel ouvert. J’ai assisté aux premières répétitions, puis, comme souvent, je laisse les clés au metteur en scène.
Le cirque est un art de la métaphore et du merveilleux, comme le conte…
F. M. : Le cirque est évocation, plus près du poème que de la narration. Nous avons tous en tête des représentations d’Alice, à travers l’illustration, le cinéma, le dessin animé. La dramaturgie montre le chemin d’un poème, d’une forme ouverte, elliptique, pour que le spectateur soit activé durant la représentation, qu’il raccommode lui-même les paysages. Les personnages et les scènes du livre sont presque tous là mais transposés. L’enjeu est moins de raconter une histoire que de partager des climats, des sensations, une vibration. Parce qu’un livre, c’est aussi de l’énergie pure.
Propos recueillis par Gwénola David