Entretien / Hovnatan Avédikian
Raconter l’irracontable Adapté de deux [...]
Focus -223-Le Théâtre National de Nice
Electre de Sophocle, Oreste d’Euripide, Agamemnon d’Eschyle : Cyril Cotinaut se plonge dans la lignée des Atrides. Un cycle de trois spectacles qui éclaire l’universalité des grands textes antiques.
Quelle relation entretenez-vous avec le théâtre antique ?
Cyril Cotinaut : Si le théâtre antique a perduré jusqu’à présent, c’est moins par effet de conservatisme traditionnel, que grâce à l’universalité de thèmes capables de transcender les époques et les lieux. Les questions que se posaient des hommes, il y a 2500 ans, sont identiques pour la plupart à celles que nous nous posons aujourd’hui. Ces deux millénaires n’ont pas suffi à répondre à des problématiques qui n’ont sans doute pas de réponse. Dans un certain sens, on peut donc penser que mettre en scène ces textes aujourd’hui, ou demain, peut nous aider à montrer la relativité de nos questionnements, en les inscrivant dans un rapport plus vaste que notre seul présent.
Quelles sont les principales spécificités qui différencient le théâtre de Sophocle, celui d’Euripide et celui d’Eschyle ?
C. C. : Dans les textes que j’ai choisis, je dirais que les styles de Sophocle et d’Euripide sont assez proches : une langue concrète, fondée sur un argumentaire proche des plaidoiries de tribunaux. Eschyle est plus lyrique, davantage dans la métaphore poétique. Chez lui, les choses ne sont jamais dites directement, la langue fonctionne par sous-entendus. D’une certaine façon, sa langue est plus belle, mais moins perceptible par la seule raison.
Avez-vous imaginé un cadre de mise en scène commun pour ces trois créations ?
C. C. : Oui, car j’ai pris le parti de réunir ces auteurs plutôt que de souligner leurs différences. D’où un travail de retraduction conséquent. Leur lien est accentué par une distribution commune aux trois spectacles. Agamemnon revient, par exemple, sous les traits de son fils, Oreste ! Le fils vient tuer la mère, qui l’a tué sous les traits de son père, lors de l’épisode précédent… Cela donne la sensation d’un mouvement vengeur qui ne s’arrête jamais. La scénographie obéit également à cette quête d’un même lieu.
Quelles sont les zones de recherche que vous explorez avec votre compagnie, le TAC.Théâtre ?
C. C. : Mes deux écoles ont été le théâtre de rue et le théâtre russe, auprès du pédagogue Anatoli Vassiliev. Ce qui rapproche ces théâtres a priori opposés, c’est l’utilisation de l’improvisation comme méthode de répétition. De mon point de vue, l’improvisation est le fondement du travail de l’acteur, bien avant le texte. Le TAC.Théâtre, qui signifie Travail de l’Acteur en Création, valorise donc la créativité de l’acteur, reconnu comme artiste à part entière, capable de créer son rôle sans injonction du metteur en scène. Mon travail est de donner à l’acteur les moyens d’être libre.
Propos recueillis par Manuel Piolat Soleymat
Théâtre National de Nice, Promenade des Arts, 06300 Nice. Tél. : 04 93 13 90 90. Site : www.tnn.fr
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