TOGETHER, VITE!
La compagnie Antipodes, dirigée par la chorégraphe Norma Claire, est en résidence au Théâtre Antoine Vitez depuis 2009. Elle présente deux nouvelles pièces au cours de la saison 2010-2011.
« Comment faire entendre la voix de l’imaginaire créole ? »
Votre chemin a croisé celui du Théâtre d’Ivry Antoine Vitez il y a déjà plusieurs années. Qu’est-ce qui vous lie à ce théâtre ?
Norma Claire : La collaboration a commencé au début des années 2000 : Leïla Cukierman a découvert mon travail à Avignon, avec une pièce que j’avais créée pour le 150e anniversaire de l’abolition de l’esclavage qu’elle a souhaité programmer à Ivry-sur-Seine. Elle m’a fait rencontrer Michel Caserta, alors directeur de la Biennale de danse du Val-de-Marne : ces deux structures m’ont proposé de présenter plusieurs de mes pièces. Cette rencontre s’est fondée sur une interrogation partagée, qui porte sur la créolité et le métissage : comment faire entendre la voix de l’imaginaire créole ? Comment susciter la reconnaissance de cette identité, qui fait intrinsèquement partie de la France mais dont peu de gens, aujourd’hui, semblent se soucier ?
La question de la créolité est clairement posée dans les pièces que vous allez présenter durant cette saison.
N. C. : En effet, sur deux modes très différents. Mélés (création 2010) est une sorte de manifeste : je travaille avec de jeunes danseurs dont la technique – le hip hop – est chargée de revendications. Il s’agit pour moi de repérer un discours qui vient de la rue et de l’emporter dans une réflexion plus profonde, qui questionne la politique, le racisme, les idées préconçues. Sur scène, les danseurs parlent et racontent les croisées culturelles permanentes qui ont forgé leur parcours. Il y a une dimension frontale très forte : ils viennent du fond de scène et ils vont vers l’avant, comme dans la rue ! Together, vite !, qui sera créé en mars 2011, met en dialogue la danse contemporaine, les danses africaines, le hip hop et des musiciens de toutes cultures : il s’agit de mettre en valeur la rondeur et la complétude du monde, avec toutes ses couleurs de peau, de mouvement, de musique… Et de rappeler que l’évidence – à l’heure où l’Occident est marqué par le retour à un racisme extrêmement dangereux –, c’est d’être ensemble.
Les croisements de culture s’expriment aussi dans votre mode de travail : pour Mélés, vous avez travaillé aussi bien en Guyane qu’en région parisienne…
N. C. : C’est fondamental pour moi, tout particulièrement pour cette création qui unit de jeunes danseurs d’Ivry-sur-Seine et de Guyane (où j’ai travaillé en résidence-hip hop pendant six ans, avec le soutien de la région et de la DRAC). Inviter ces jeunes à travailler dans des espaces si différents, c’était aussi leur proposer de s’ouvrir à d’autres mondes, de les faire entrer dans l’ailleurs.
Propos recueillis par M. Chavanieux
Mélés, le 2 octobre 2010 à 20H (après la présentation de la saison) ; Together, vite !, tout public, de 7 à 107 ans. Du 1er au 20 mars 2011 : les mercredis à 14h30, les samedis à 18h, les dimanches à 16h (+ représentations scolaires).