L’art total de Pierre Rigal
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Focus -202-Théâtre de la Renaissance / Oullins
Percussionniste, compositeur et metteur en scène, Roland Auzet aime à croiser musique, théâtre, cirque, danse et nouvelles technologies. Il a conçu pour le Théâtre de la Renaissance un projet qui lui ressemble : curieux, inventif et ouvert.
Quel est l’axe majeur de votre projet pour le Théâtre de la Renaissance à Oullins ?
Roland Auzet : Il s’articule sur la musique comme prisme pour appréhender les écritures actuelles qui, de plus en plus, se forgent à même le plateau et croisent les arts. La création aujourd’hui se nourrit de la pluridisciplinarité. Pour autant, les arts ne se confondent pas et n’ont pas sacrifié leurs particularités dans ce partage. La sensibilité musicale peut apporter une autre lecture, par l’attention au rythme, à la hauteur, au timbre, à la relation au temps. Le monde s’écoute autant qu’il se lit. Le projet, symboliquement nommé « AVEC », se fonde sur l’échange avec les artistes, avec le territoire, avec le public, avec l’équipe. Diversifiée pour être au service de tous, la saison décline l’identité « théâtre et musique » en tenant l’équilibre entre accueil et production, entre répertoire et création. Elle vise à faire découvrir des œuvres dynamiques, pertinentes et visionnaires sur le devenir des pratiques artistiques.
Comme la poésie de Tarkos, portée par Hervé Pierre et Pascal Duquenne, que vous mettez en scène ?
R. A. : Tarkos invente de petites mécaniques textuelles à partir de situations qui revisitent la relation entre les êtres, l’au-delà, l’amour, la question de l’autre. Son écriture ouvre un regard sur le monde par l’espièglerie, l’humour. Elle se déploie comme autant de rubik’s cubes poétiques où le sens, la valeur des mots se déplacent. A travers les poèmes choisis se trame l’histoire d’un homme qui essaie de convaincre l’autre de l’utilité des mots. Face à Hervé Pierre, acteur dela Comédie-Françaisequi manie la langue en virtuose, Pascal Duquenne impose son être différent et questionne la logorrhée. J’ai composé des pièces pour électronique et piano, instrument emblématique de l’éducation bourgeoise, qui tissent un contrepoint avec les poèmes et l’anormalité.
Avec Aucun homme n’est une île, création pour jeune public sur un texte commandé à Fabrice Melquiot, vous croisez musique, théâtre et nouvelles technologies.
R. A. : La pièce met face à face un adolescent, Oscar, 14 ans, et son avatar pour interroger les frontières entre le réel et le virtuel, poser autrement le débat sur l’identité et la traçabilité, sur la simulation et le passage à l’acte. Les jeunes aujourd’hui sont quotidiennement en prise avec des mondes virtuels. Comment les pratiques des jeux vidéo, d’internet, des réseaux sociaux influent-elles sur nos comportements, sur notre perception de la réalité, sur nos capacités d’action, de vivre ensemble ? Au Japon s’est développée une pathologie : les « ikikomori » se coupent de leur famille, de leurs amis, et ne communiquent avec l’extérieur que virtuellement. Ce spectacle cherche à comprendre pourquoi « nous sommes trop petits pour nous perdre ! ».
Vous reprenez également Histoire du soldat, de Ramuz sur la partition de Stravinsky, œuvre du répertoire dont vous donnez une vision contemporaine.
R. A. : Thomas Fersen porte tous les rôles du livret et apporte sa singularité, son onirisme un peu lunaire et sa manière joueuse de débusquer la poésie dans la plus banale quotidienneté. Il donne à entendre ce texte majeur dans toute son âpre beauté.
Entretien réalisé par Gwénola David
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