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Qui doit l’emporter : le sang qui a fait [...]
Fidèle au théâtre de Molière, Benoît Lambert crée Les Femmes Savantes à la Comédie de Saint-Étienne, centre dramatique national qu’il dirige depuis 2021. Choisissant de nous faire « voyager vers un pays éloigné » plutôt que de procéder à une actualisation, le metteur en scène cherche à mettre en évidence toute la profondeur de cette pièce sur l’émancipation féminine.
« Ce que je trouve passionnant dans le théâtre de Molière, c’est qu’il s’écrit dans un contexte qui nous est étranger : celui d’une société aristocratique au sein de laquelle la bourgeoisie est en train d’émerger. Une lutte des classes est à l’œuvre. Elle aboutira, cent ans plus tard, à la Révolution. Mais avant cela, Molière fait la critique de cette classe montante par le biais de personnages qui la représentent. Dans ses pièces, les bourgeois sont toujours mis en accusation. Ils sont présentés comme des êtres ridicules, qui ne sont jamais au niveau, des êtres qui essaient mais échouent, qui viennent outrager sur scène les valeurs aristocratiques. Les Femmes savantes fonctionnent de cette manière. À travers cette œuvre, Molière tend un miroir aux précieuses de la cour. Il leur dit que si elles vivent comme Philaminte, Bélise et Armande (ndlr, les “femmes savantes” de la pièce), contrairement à ces dernières, elles, elles le font bien. Et pourtant, paradoxalement, ce sont les bourgeois qui occupent tout l’espace.
Jeu de massacre dans une maison bourgeoise
Molière est un auteur qui ne défend aucune thèse. Il regarde la société qu’il représente à la façon d’un ethnologue, de manière finalement assez froide, assez sèche, en éclairant toutes les ambivalences et les complexités de ses personnages. Si on considère Les Femmes savantes, le fait de penser qu’il s’agit d’une pièce misogyne est, selon moi, un contre-sens. Le pouvoir masculin, qui est un pouvoir des petits arrangements, est ici regardé de façon très suspicieuse. Ce qui est très beau, c’est que dans cette famille bourgeoise, on trouve des femmes qui résistent aux hommes. Alors, bien sûr, elles sont extravagantes, folles, comme on le dit à plusieurs reprises, évidemment ridicules, à de nombreux moments excessives. Mais elles s’affranchissent de l’ordre bourgeois en martelant que les intérêts matériels sont méprisables. Et ça, c’est comme un choc, comme un télescopage au milieu de la pièce. Il y a un enthousiasme libérateur et une vraie puissance politique dans la manière dont ces femmes s’émancipent en faisant tout ce qu’elles ne sont pas censées faire, notamment lire des livres et se cultiver. »
Propos recueillis par Manuel Piolat Soleymat
Du lundi au vendredi à 20h, le samedi 31 à 17h. Tél. : 04 77 25 14 14. Durée : 2h. www.lacomedie.fr
Également du 5 au 7 février 2026 à la Comédie de Colmar, les 17 et 18 février au Théâtre de Nîmes, les 10 et 11 mars à La Coursive à La Rochelle, les 17 et 18 mars au Bateau Feu à Dunkerque, les 26 et 27 mars à L'Odyssée à Périgueux, les 31 mars et 1er avril au Théâtre d'Angoulême.
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