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Théâtre - Critique

« Cavalières » d’Isabelle Lafon, bringuebale, s’épanche, papillonne, déploie son charme par petites touches

« Cavalières » d’Isabelle Lafon,  bringuebale, s’épanche, papillonne, déploie son charme par petites touches - Critique sortie Théâtre Paris la colline
Karyll Elgrichi, Johanna Korthals Altes, Sarah Brannens et Isabelle Lafon dans Cavalières. © Laurent Schneegans

La Colline – Théâtre national / texte Sarah Brannens, Karyll Elgrichi, Johanna Korthals Altes et Isabelle Lafon / conception et mise en scène Isabelle Lafon

Publié le 10 mars 2024 - N° 319

Fidèle au Théâtre national de La Colline, où elle a récemment présenté Les Imprudents et Je pars sans moi, Isabelle Lafon y revient avec sa dernière création intitulée Cavalières. Aux côtés de Sarah Brannens, Karyll Elgrichi, Johanna Korthals Altes, la comédienne, autrice et metteuse en scène ouvre une porte sur le quotidien entrelacé de quatre femmes. Une proposition à l’âme vive et tendre qui assume le risque de l’incertitude.

« Madeleine est particulière, elle est dite officiellement handicapée – si je pouvais me passer de ce mot je le ferais », explique Isabelle Lafon à propos du personnage central de Cavalières qui reste hors champ tout au long de la représentation. L’existence de cette enfant singulière nous parvient en effet uniquement à travers les mots des quatre femmes qui ont accepté de partager un même appartement pour pouvoir s’occuper d’elle. L’une d’entre elles, Saskia (Johanna Korthals Altes), est une vieille amie de Denise (Isabelle Lafon), devenue la tutrice de Madeleine suite au décès de sa mère. Les deux autres — Jeanne (Sarah Brannens) et Nora (Karyll Elgrichi) — ont répondu à une annonce proposant la cohabitation. Tout cela nous est raconté, en adresse directe, par les protagonistes de cette histoire qui, après s’être avancées depuis le lointain dans un rai de lumière, prennent la parole à tour de rôle, d’abord en ligne, face au public, puis depuis divers endroits du plateau, au sein d’un espace sans décor et accessoire, hormis trois tabourets qui serviront de siège ou de défouloir à certaines colères. Comme à son habitude, avec ce nouveau spectacle, Isabelle Lafon donne corps à un théâtre au présent qui, ici, parfois se trouve, parfois se cherche.

Un théâtre au présent

Cavalières laisse libre cours à la matière humaine composite d’une famille réinventée pour le bien-être d’une enfant à la lenteur particulière. La pièce coécrite par les quatre comédiennes dévoile des motifs de l’intime et du quotidien : la différence, la fragilité, l’amitié, mais aussi le monde du cheval (le personnage de Denise est entraîneuse de trotteurs), qui passionne depuis longtemps Isabelle Lafon. Ce théâtre délicat, sans artifice, croise sensibilité et humour, plaisir des mots et authenticité des présences, vérité et vulnérabilité de la représentation. On écoute une interprète puis une autre. Le texte brouille habilement les repères de la narration. Il convoque le rire, l’emportement, l’émotion, tente de faire apparaître des évidences qui par moments se dérobent. Tout n’est pas d’égale intensité dans cette jolie fugue à quatre voix. La sincérité et le cran des comédiennes confèrent pourtant de l’allure à l’ensemble. Entre vivacité des élans et imprécision de l’instant, Cavalières bringuebale, s’épanche, papillonne, déploie son charme par petites touches.

Manuel Piolat Soleymat

 

A propos de l'événement

Cavalières
du mardi 5 mars 2024 au dimanche 31 mars 2024
la colline
15 rue Malte-Brun, 75020 Paris

Grand Théâtre. Du mercredi au samedi à 20h30, le mardi à 19h30, le dimanche à 15h30. Relâche exceptionnelle le 10 mars. Tél. : 01 44 62 52 52. Durée: 1h25

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