Électre des bas-fonds de Simon Abkarian
texte et mise en scène Simon Abkarian
Publié le 16 décembre 2020 - N° 289Après les « tragédies de quartier » Simon Abkarian propose sa version d’Electre, une tragédie de chair et de sang d’une puissance dramatique exceptionnelle, fusionnant jeu, musique, danse et chant. Un spectacle total, porté par une vingtaine d’artistes de haut vol.
Le cœur en lambeaux, toute de douleur, de misère, de colère, de haine obsessionnelle, l’Electre de Simon Abkarian, devenue servante dans un bordel des bas-fonds d’Argos, est un personnage extraordinaire. Tout comme son frère Oreste, exilé en fuite qui se déguise en femme, poursuivi par les assassins d’Egysthe, appelé à contrecœur à accomplir une terrifiante vengeance. Comme Clytemnestre aussi, mère dévastée qui pleure la mort de sa fille Iphigénie immolée par son père, meurtrière de son époux Agamemnon, héros de guerre. « Là où vit Électre, il n’y a pas de dieux. Il y a la nuit qui n’en finit pas de tomber sur les damnés de ce monde. » souligne l’auteur, metteur en scène et comédien, qui signe là un texte d’une force et d’une beauté sidérantes. La fable qu’il choisit de raconter est une histoire impressionnante de chair et de sang, de souffrances et de vengeances, où comme toujours Simon Abkarian rend justice aux femmes.
Une éblouissante fête de théâtre
Nourrie d’expériences et de science, la langue hardie, limpide, puissante éclaire brillamment les mythes, les meurtres et les malédictions. La scène mobilise ici tous ses moyens pour créer au cœur du tragique une fête de théâtre, en unissant la parole, la musique et la danse, en convoquant les spectres, en accordant une importance majeure aux chœurs. « Le chœur donne sa puissance aux histoires individuelles. Le chœur est le témoin d’avant le meurtre. Il voit tout en amont. Il flaire le sang à venir, le pressent, l’annonce. C’est le chœur qui fait nôtre le protagoniste ; le premier athlète. Il en est la matrice. » confie Simon Abkarian. Un chœur féminin surtout. Un chœur de celles qu’on ne se soucie jamais d’entendre, de prostituées qui chantent, dansent, racontent leur condition de putains asservies. La danse s’inspire notamment des gestes du Kathakali – on se souvient de la grâce de Kathakali Girls, épopée dansée par Catherine Schaub Abkarian (sublime Clytemnestre), Annie Rumani et Nathalie Boucher, à nouveau réunies pour Electre. Quant à la musique, les sons rock ou blues du trio Hawlin’ Jaws s’aventurent ici vers des rives inédites. Porté par quatorze comédiennes-danseuses, quatre comédiens-danseurs et trois musiciens, ce spectacle merveilleux emporte et subjugue autant l’esprit que le cœur.
Agnès Santi
A propos de l'événement
Électre des bas-fonds de Simon Abkariandu vendredi 22 janvier 2021 au samedi 23 janvier 2021
ESPACE MICHEL SIMON
Esplanade Nelson-Mandela, 93160 Noisy-le-Grand
à 20h30. Tél : 01 49 31 02 02. Durée : 2h30. Spectacle vu au Théâtre du Soleil à sa création en septembre 2019.
Également au Théâtre Molière à Sète les 10 et 11 février 2021, à la MC2 Grenoble du 24 au 26 février 2021, aux Célestins à Lyon du 3 au 13 mars 2021, au Théâtre National de Nice du 24 au 26 mars 2021, au Grand T à Nantes du 6 au 10 avril 2021, à La Maison de la Culture d’Amiens en co-accueil avec La Comédie de Picardie les 19 et 20 mai 2021.