La Terrasse

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Théâtre - Entretien

D’autres mondes de Frédéric Sonntag

D’autres mondes de Frédéric Sonntag - Critique sortie Théâtre Montreuil Nouveau théâtre de Montreuil – CDN
Frédéric Sonntag ©Jean-Louis Fernandez

Nouveau théâtre de Montreuil / de et mes Frédéric Sonntag

Publié le 13 juillet 2020 - N° 286

Pour sa nouvelle création, Frédéric Sonntag signe et met en scène un texte sur les mondes parallèles.

 

Qu’est-ce qui vous a amené à vous intéresser aux mondes parallèles ?

Frédéric Sonntag : C’est un motif qui me passionne et me travaille depuis longtemps, il est déjà présent en filigrane dans mes pièces précédentes, ne serait-ce parfois que dans la structure narrative avec plusieurs histoires qui s’entrecoupent, qui s’interconnectent, plusieurs niveaux de réalités qui dialoguent entre eux. Ce qu’on appelle les « mondes parallèles » ou les « réalités multiples » ou en physique les « multivers » est le fait que notre réalité soit composée d’une multitude de mondes, de réalités qui coexisteraient, où nous existerions en d’autres versions de nous-mêmes, comme si tout ce qui ne s’était pas réalisé existait réellement dans d’autres espaces-temps. Je voulais me pencher un peu plus sur ce motif fascinant : quelle est la réalité concrète de ces mondes ? où existent-ils ? quand ? sous quelle forme ?  D’autant qu’on ne parle pas tout à fait de la même chose en science-fiction ou en physique théorique, et que les mondes intérieurs de la mémoire sont aussi des motifs parallèles.

« Les mondes parallèles sont presque une mythologie de la culture pop. »

Les mondes parallèles sont très présents dans la culture pop, qui vous intéresse aussi dans vos précédents spectacles.

F.S. : Les mondes parallèles sont presque une mythologie de la culture pop. Pour chacun de mes spectacles, j’aime explorer quelle trace un motif laisse sur notre imaginaire, sur notre façon de nous représenter le monde. Ce qui m’intéresse notamment avec les mondes parallèles, c’est que ce motif a surgi dans les années 1950, véhiculé par la science-fiction, mais aussi par des découvertes en physique théorique avant que le terme se répande dans le langage courant, dans des domaines très différents.

Même le confinement a été qualifié par certains de « monde parallèle » !

F.S. : Exactement ! Je crois qu’on n’a jamais écrit autant de livres sur ce thème ni jamais autant employé ce motif. Est-ce que cela veut dire que le monde dans lequel on vit n’est pas réellement vivable et donc qu’on fantasme sur l’idée que d’autres mondes existent ? Est-ce une façon de se consoler ou d’anticiper, de rêver et d’imaginer que d’autres mondes soient possibles et de les réaliser ? Ce sont toutes ces questions que j’avais envie d’explorer dans une fiction.

Comment vous y êtes-vous pris ?

F.S. : Je passe toujours par une phase d’enquête et j’ai ainsi accumulé des matériaux parmi lesquels des personnages réels qui m’intéressaient : un physicien américain qui a théorisé les mondes multiples en physique théorique, par exemple. Je voulais garder des référents réels pour écrire ensuite une fiction. Je mets en scène un quatuor de personnages. Ils ont des liens les uns avec les autres et chacun dans son domaine conçoit des réalités alternatives. Il y a un jeune physicien français qui conçoit une théorie des mondes possibles dans les années 60 pendant qu’au même moment, alors qu’ils ne se connaissent pas, un écrivain soviétique conçoit à l’intérieur de ses romans des univers parallèles. On suit aussi leurs enfants, 50 ans plus tard, qui sont l’un musicien d’un groupe de rock et l’autre une futurologue. Chacun conçoit des mondes autres dans son domaine d’action, puis, intimement, d’un point de vue plus subjectif, fait l’expérience d’un monde intérieur via un événement qui vient remettre en question le rapport au réel de chacun de ces personnages. Il se tisse ainsi un champ poétique sur la question des mondes parallèles.

Est-ce osé de parler de ce thème au théâtre ?

F.S. : Oui, tout à fait. C’est d’un côté un thème très populaire – en science-fiction par exemple – et de l’autre côté, on touche à des domaines de la science, de la physique théorique qui peuvent faire peur. Ça me passionne : comment parler de cela au théâtre ? Comment rendre ces questions accessibles tout en les vulgarisant, dans le bon sens du terme ? Il ne faut pas tomber dans la conférence. Et la pièce parle aussi d’autre chose. La pièce commence d’ailleurs comme cela : « on va parler de physique quantique mais ne vous inquiétez pas, cela va bien se passer ! » Le plus important, c’est l’imagination. Je reprends cette idée d’une conférence de Richard Feynman pour parler des particules élémentaires. L’imagination, c’est un peu le fil conducteur de la pièce.

 

Entretien réalisé par Isabelle Stibbe

A propos de l'événement

D’autres mondes
du mardi 22 septembre 2020 au vendredi 9 octobre 2020
Nouveau théâtre de Montreuil – CDN
10 place Jean-Jaurès, 93100 Montreuil

Du mardi au vendredi à 20h, samedi à 18h. Relâche les dimanches et lundis. Tél. : 01 48 70 48 90.

Tournée : Théâtre-Sénart, scène nationale (77) du 5 au 7 novembre 2020 ; La Snat61, scène nationale Alençon / Flers / Mortagne-au-Perche (61) les 16 et 17 novembre 2020 ; Points communs – nouvelle scène nationale de Cergy-Pontoise / Val d’Oise (95) les 21 et 22 janvier 2020 ; le Grand R, scène nationale de La Roche-sur-Yon (85) les 26 et 27 janvier 2021.

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