Les Larmes amères de Petra von Kant
Le fondateur de la compagnie du Chat Foin met [...]
Deux amis s’élancent, ensemble, sur les chemins du monde. C’est Cri et Ga cherchent la paix, une fable philosophique de Philippe Minyana créée, au Théâtre du Rond-Point, par le metteur en scène Frédéric Maragnani. Une proposition qui déçoit.
« Ce jour est à marquer d’une pierre blanche Ga j’ai laissé l’inquiétude de côté » dit Cri dans un pré planté d’arbres. « Je dois dire que souvent tes yeux me font peur », répond Ga. « C’est-à-dire que je vois dans le monde ce qu’il faudrait ne pas voir et j’ai une faiblesse dans les membres », enchaîne le premier. Souhaitant se débarrasser de leurs terreurs et de leurs fantômes, ces deux amis entament une marche initiatique, à la recherche d’une forme de paix intérieure. Lors de ce périple insolite, ils croisent un chat crucifié, une vache morte, des femmes à barbe, un neveu abandonné par son mari… Ils traversent une grande prairie, empruntent des routes et des chemins, visitent un musée, passent près d’une source miraculeuse, s’arrêtent chez une prénommée Colette, qui leur révèle sa recette des paupiettes. Puis ils arrivent chez une vieille femme qui, elle, a trouvé la paix. Ce « Cri » qui ne cesse de pousser la chansonnette, c’est Christophe Huysman. Ce « Ga » longiligne qui ne lâche pas son compagnon d’une semelle, c’est Gaëtan Vourc’h.
Un périple loufoque et métaphorique
Comme les noms de ces personnages le laissent deviner, c’est pour les deux comédiens que l’auteur a imaginé Cri et Ga cherchent la paix. C’est inspiré par les corps, les voix, les présences et personnalités de ces complices de longue date (aujourd’hui accompagnés sur scène par Moustafa Benaïbout, Marion Camy-Palou et Juliette Savary) qu’il a écrit cette ode à la fraternité ouvrant sur les paysages du fantastique. A la lecture de la pièce (publiée chez L’Arche Editeur), on retrouve les entremêlements de cocasserie et de mélancolie, les juxtapositions de considérations triviales et de réflexions existentielles qui font le charme, l’acuité du théâtre de Philippe Minyana. Mais, sur le plateau du Théâtre du Rond-Point, toutes ces choses nous glissent entre les doigts. Car la mise en scène de Frédéric Maragnani ne parvient pas à faire voyager notre imaginaire, et peine à créer la matière organique de cette écriture exigeante. Réduites à une succession de tableaux statiques, les pérégrinations de Cri et de Ga se révèlent monotones. Elles provoquent quelques rires, mais achoppent sur les vérités humaines (et théâtrales) qu’elles devraient faire surgir.
Manuel Piolat Soleymat
Le fondateur de la compagnie du Chat Foin met [...]