Tabula Rasa
La jeune auteure et metteure en scène belge [...]
Avignon / 2017 - Entretien / Alain Timár
Alain Timár met en scène la confrontation entre le Dealer et le Client, rebaptisés A et B, avec Robert Bouvier et Paul Camus, accompagnés à la batterie par Pierre-Jules Billon.
Pourquoi et comment monter ce texte ?
Alain Timár : Il fallait réunir plusieurs paramètres. D’abord laisser passer le temps après Chéreau, pour essayer, non pas de renouveler le genre, mais de servir au mieux cette partition hors du commun. Je n’aurais pas monté ce texte il y a encore dix ans. Il faut une certaine maturité. Et deux acteurs, deux artistes de grand talent avec lesquels je me sentais assez de force pour aborder cette pièce.
Vous les trouvez avec Robert Bouvier et Paul Camus…
A. T. : Il fallait essayer d’approcher au plus juste les personnages, le Client et le Dealer. Dans le personnage du Dealer, et son côté un peu loubard, voyou, gangster, je voyais bien Paul Camus. Pour le Client, Robert Bouvier, dont j’aime la stature et la sensibilité, s’imposait. Je les ai réunis et j’ai vu que ça fonctionnait très bien. Tous les deux sont des travailleurs qui aiment aller au bout des choses, et il fallait leur grande rigueur pour aborder ne serait-ce que la forme du texte, dont il faut respecter le phrasé, la construction, la syntaxe et la ponctuation, à moins de s’y perdre et de le rendre incompréhensible.
« C’est par le développement du langage du corps que nous avons pu développer un véritable dialogue. »
Vous ajoutez un troisième personnage…
A. T. : Pierre-Jules Billon est le troisième protagoniste de cette rencontre, véritable personnage qui parle avec sa batterie. Il crée quelquefois l’atmosphère et explore toutes les possibilités de la batterie, notamment tous ces frottements de l’ordre du grain, que le spectateur n’a pas l’habitude d’entendre, pour créer de l’atmosphère, de la tension, et faire en sorte que la musique contribue au trilogue qui lie les différents soliloques.
Comment transformez-vous ces soliloques en dialogue ?
A. T. : Le texte n’a pas une forme dialoguée classique, d’où l’importance de développer le langage du corps, en vue d’un langage global. Celui qui ne parle pas doit parler aussi, dans une écoute réelle et non artificielle de l’autre. C’est par le développement du langage du corps que nous avons pu développer un véritable dialogue.
Pourquoi dites-vous que la maturité est requise pour aborder ce texte ?
A. T. : Pour ne pas en rester à ce faux dialogue entre un client et un dealer, mais l’élargir à la tragédie de la condition humaine. Dès la première phrase le Dealer – je les appelle A et B pour ne pas en rester à la fausse piste de la drogue – propose de fournir à l’autre ce qu’il désire. Mais quel est l’objet de cette transaction commerciale ? On l’ignore. Il n’y a pas de réelle marchandise. L’objet de la rencontre se situe à un autre niveau. Très vite on comprend que l’objet n’est pas le but. C’est autre chose qui se joue…
Catherine Robert
à 17h (relâche les 10, 17 et 24 juillet). Tél. : 04 32 76 24 51.
La jeune auteure et metteure en scène belge [...]