Bruno Dairou met en scène Caligula d’Albert Camus

« Je me suis senti tout d’un coup un besoin d’impossible ». C’est ainsi que Caligula, empereur de Rome, explique son absence au Palais, qui fait suite au décès de sa sœur et amante Drusilla. Revendiquant une liberté absolue face à l’absurde du monde, il sème la destruction sans se soucier de ce que signifie le bien ou le mal, sans se soucier de la vie. Nihiliste, intelligent, fantasque, Caligula, « bourreau de lui-même autant que des autres », interroge chacune et chacun par sa démesure et sa quête despotique. Dans la mise en scène de Bruno Dairou, les spectateurs devenus sénateurs de Rome sont amenés à devenir arbitre des affrontements, à questionner les enjeux d’une liberté tragiquement illimitée.

Des spectateurs-sénateurs face à la cruauté du tyran

Dans des costumes très contemporains, au sein d’un espace sculpté par des lumières nettes et par le déplacement de cubes, la mise en scène laisse émerger toute la complexité du personnage, toute l’amplitude de la tyrannie et de l’arbitraire quand il a les moyens du pouvoir. En filigrane la pièce pointe vers la possibilité des égarements et des folies collectives à chaque époque, vers leur traduction concrète maintes fois constatée dans l’Histoire, et questionne sur l’action à tenir face à la cruauté des tyrans. La mise en scène est au service de la beauté et de l’actualité de la langue, du lyrisme du personnage-titre, incarné par Antoine Laudet.

Agnès Santi