Les Précieuses ridicules, d’après Molière, mise en scène Stéphane Varupenne et Sébastien Pouderoux
Pour la Saison Molière 2022 de la [...]
Avec la force et la sincérité du célèbre cinéaste, Eddy d’Aranjo cherche son théâtre. Après Jean-Luc Godard – je me laisse envahir par le Vietnam propose une expérimentation marquante et profondément novatrice.
Quand l’art expérimente vraiment, quand la pratique s’affranchit des attendus, quand surgit dans le paysage un objet si étrange, notre rapport au théâtre est ébranlé, comme le rôle qu’on s’y donne en tant que critique. Après Jean-Luc Godard… est un spectacle dont il est difficile de rendre compte sans craindre de réactiver les éternelles oppositions entre les tenants d’un art populaire et accessible et ceux qui soutiennent les aventures plus expérimentales. Ces catégories sont discutables, pas forcément opposables, et réduire ce spectacle à un objet abscons, ce serait se taire sur le charme qu’il déploie, qui tient sans doute à l’entière sincérité de la démarche de ses concepteurs et à ce sentiment d’assister à une œuvre comme on n’en a jamais vue, qui signe sans conteste l’apparition d’un artiste et d’une troupe, Objet bleu et brutal – Recherches réalistes, promise à un bel avenir. Mais en même temps, passer sur ce qu’il véhicule de moments où il faut accepter de ne pas tout comprendre de ce qui se passe, de ce qui tente de se dire, de se partager, serait trompeur. A la fin, ce qui reste, c’est quand même la sensation d’avoir assisté à un événement théâtral important et l’embarras au moment de rendre compte en quelques lignes d’un spectacle protéiforme, riche, dense et pourtant, parfois, d’une touchante simplicité.
« Transpositions analogiques »
Tout en délicatesse, en douceur. C’est peut-être d’ailleurs cela qui demeure le plus. Cette impression qu’ici tout est fait avec grand soin. Avec précaution. C’est aussi là, dans cette manière de faire, que se niche le politique. Eddy d’Aranjo a été repéré par le théâtre public depuis quelque temps. Assistant de Julien Gosselin, de Marie-José Malis, artiste associé au TNS – qui l’a formé –, à la Commune et au CDN de Tours, il est passé par la case philosophie à l’École Normale Supérieure avant d’en venir au théâtre. Avec Après Jean-Luc Godard… il a voulu créer une pièce autour du célèbre cinéaste, non pas du personnage médiatique, de sa vie, ni même de ses films, mais plutôt de son approche de la pratique artistique. Il a finalement choisi pour cela de procéder par « transpositions analogiques », c’est-à-dire d’essayer de transposer l’état d’esprit de Godard, son rapport à l’art et ses questionnements, à l’espace du plateau. Cela donne un spectacle où à une scène de théâtre disons traditionnelle succède une sorte de performance puis une réflexion sur le cinéma de l’artiste suisse qui touche le théâtre par ricochets. Le tout autour d’une sorte de double de Godard figuré par un masque vieillissant aux allures freak. Il faut aller le voir.
Eric Demey
à 19h, les lundis et le vendredi 11 à 20h, relâche le dimanche et le mercredi. Tel : 01 43 13 50 60. Durée 2h40. Spectacle vu au Théâtre de la Commune à Aubervilliers.
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