Volchok
©Crédit photo : Philippe Laurençon
Légende : Trois circassiens aux prises avec les fardeaux de la vie
Crédit photo : Philippe Laurençon
Légende : Trois circassiens aux prises avec les fardeaux de la vie
Publié le 10 décembre 2007
La nouvelle création du cirque Trottola cherche son univers, entre émotion de peu et misère poético-romantique.
« Le choix d’une expression libre engendre un art pauvre, lié à la contingence, à l’événement, au présent, à la conception anthropologique, à l’homme "réel" (Marx). C’est là un espoir, un désir réalisé de rejeter tout discours univoque et cohérent (…) car l’univocité appartient à l’individu et non pas à "son" image et à ses produits. » écrivait Germano Celant, dans ses Notes pour une guérilla en 1967. Cette définition de l’Arte Povera, attitude plus que mouvement lancée dans le sillage de l’exposition « Arte Povera e im spazio » organisée à Gênes par le critique italien, sied bien à la démarche du Cirque Trottola (toupie en Italien) : aller à l’encontre du clinquant télévisuel et des forfanteries pailletées de la virtuosité, voire se dépouiller des acquis culturels pour laisser surgir l’émotion au hasard du geste et révéler la vérité originaire du corps. Surgeon, né en 2002, de la troupe Convoi exceptionnel, la compagnie bricole un cirque nomade, fait de bric et de broc récupérés dans les malles de l’enfance et l’imagerie fantasmée des chapiteaux d’antan.
Une histoire de ballots et de chiffons
« Volchok » (toupie… en Russe), sa deuxième création, se niche dans un ailleurs indécis, peut-être dans les confins brumeux de quelque port lointain. Deux personnages en vareuses dépenaillées s’obstinent à déplacer péniblement de lourds ballots, tandis qu’un troisième, garnement hirsute, tente de s’accrocher en clandestin pour forcer le chemin du destin. Lestés par le fardeau de la vie, leurs déplacements insensés deviennent prétextes à gaucheries clownesques, jeu d’équilibres et envols acrobatiques. Ces ardents bâtisseurs de l’absurde, éternels ahuris par la mécanique du monde et les mystères de la pesanteur, se livrent à leurs menues occupations avec l’énergie de pauvres bougres ferrés dans l’inextricable existence. Titoune (trapéziste voltigeuse), poil de carotte ébouriffé, Bonaventure Gacon (clown et porteur), simplet balourd, et Mads Rosenbeck, (jongleur), manipulateur lunaire, tous trois certes attendrissants, peinent encore à tricoter leur histoire et ne s’échappent guère des clichés du genre. « Le but est d’avoir le moins de conscience possible ; de faire les choses avec naturel, sans intellect. », expliquent-ils. A force pourtant, la quête d’authentique et la créativité innée de « l’homme du commun » cher à Dubuffet finissent aussi par se formater. L’univers, d’un fruste poético-romantique, ne fait qu’habiller la succession des numéros. Restent les performances, remarquables, de mains à mains, de cadre coréen et les très inventifs jeux d’équilibres sur balai brosse, qui font de ce spectacle un moment sympathique.
Gwénola David
Volchok, par le Cirque Trottola, du 5 au 16 décembre 2007, à 20h, sauf dimanche à 17h30, relâche lundi, mardi et jeudi et le mercredi 12 décembre, sous chapiteau à l’Espace Cirque d’Antony, rue Georges Suant, 92 Antony Rens. 01 46 66 02 74 et www.theatrefirmingemier-lapiscine.fr. Durée : 1h15. Spectacle vu au Sirque –Pôle cirque de Nexon en Limousin.