La Terrasse

"La culture est une résistance à la distraction" Pasolini

Avignon / 2015 - Gros Plan

TransFabbrica

TransFabbrica - Critique sortie Avignon / 2015 Avignon Le Petit Louvre
© Frédéric Desmesure TransFabbrica ou l'« usine illuminée » par La Compagnie Le Grain.

THEATRE MUSICAL / Le Petit Louvre / Chapelle des Templiers / Compagnie Le Grain / mes Christine Dormoy

Publié le 26 juin 2015 - N° 234

En s’appuyant sur la musique de Nono (La Fabbrica illuminata), Berio (A-Ronne) et Ligeti (Poème symphonique pour 100 métronomes) et sur des textes de Pasolini, la Compagnie Le Grain propose une plongée poétique dans le monde ouvrier.

L’art a pour ambition de dire le monde, le spectacle a la capacité de le représenter. À condition de ne pas le perdre de vue, de ne pas laisser les mots se laisser enfermer dans la griserie des mots. À l’origine de TransFabbrica, il y a la volonté de la metteuse en scène Christine Dormoy de « faire un pas de côté, loin des institutions, de revenir aux sources du geste de création ». Ce geste, elle le trouve dans La Fabbrica illuminata, œuvre pour soprano et bande magnétique de Luigi Nono (1924-1990) qui fut censurée à sa création en 1964, « une œuvre qui entre dans le concret du son, qui fait entendre l’usine et les ouvriers, qui est en prise avec son temps ». Luigi Nono voulait témoigner de la condition ouvrière : il y fait entendre les hommes et les machines, qu’il a enregistrés dans une usine sidérurgique de Gênes. En même temps, il parvient, en restant fidèle à son langage musical, à échapper à l’écueil du naturalisme : c’est bien une oeuvre d’art, composée avec les ouvriers, et non quelque musique documentaire sur le monde de l’usine.

Œuvre mémorielle

À cinquante ans de distance, Christine Dormoy souligne l’actualité que La Fabbrica illuminata a conservée et rapproche l’œuvre de Nono de celle de Pasolini : « Pasolini est un artiste qui prend la parole dans son siècle, une parole qui avance en étant poétique ». Quand, avec l’aide du Groupe musical expérimental d’Albi, elle crée le spectacle TransFabbrica dans l’usine sidérurgique désaffectée (devenue musée) du Saut-du-Tarn, Christine Dormoy fait à son tour œuvre de témoignage, œuvre mémorielle : « C’est la réalité d’aujourd’hui : des lieux qui ont existé avec leur collectif, leur énergie, leur joie aussi malgré des conditions de travail souvent difficiles. Le spectacle parle de ce passage d’un siècle à l’autre », que symbolise – idée magnifique – l’effacement progressif du Poème symphonique pour 100 métronomes de Ligeti (encore une œuvre censurée!), joué en ouverture. Là encore, c’est le discours poétique qui donne sa justesse à ce regard. Pour la metteuse en scène, l’aventure ne pouvait qu’être transdisciplinaire, chaque art (théâtre, musique, danse, vidéo)  venant à sa manière « refaire le geste » des ouvriers. Dans cette répétition, il y a quelque chose de religieux et passer de l’usine à la Chapelle des Templiers permet de réinventer le rapport au lieu : « Chaque lieu va nous apporter un rayon nouveau sur cette œuvre. C’est une création permanente ».

Jean-Guillaume Lebrun

A propos de l'événement

TransFabbrica
du samedi 4 juillet 2015 au samedi 25 juillet 2015
Le Petit Louvre
23 Rue Saint-Agricol, 84000 Avignon, France

Avignon Off. 

La Chapelle des Templiers,  à 20h40. Relâche le 16 juillet. Tél. : 04 32 76 02 79.

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