Tommy Milliot reprend « L’arbre à sang » : un spectacle parfaitement maîtrisé
Le CENTQUATRE PARIS / texte d’Angus Cerini / traduction de Dominique
Publié le 27 janvier 2024 - N° 318Tommy Milliot a fait découvrir le dramaturge australien Angus Cerini grâce à cette création sensationnelle. Avec cette remuante farce noire et grotesque qui porte un regard décapant, sans aucune pitié, sur les violences domestiques, le metteur en scène signe un spectacle exigeant, parfaitement maîtrisé.
« Quand j’ai pris connaissance de la pièce pour la première fois, j’ai dit non. Je n’y comprenais rien » avoue Tommy Milliot. Au regard du spectacle qui existe aujourd’hui, on a vraiment du mal à le croire. Il a créé cette pièce la saison dernière suite à une proposition du Centre Dramatique National des Hauts-de-France : travailler sur un spectacle itinérant, quelque chose de très simple avec une structure légère. « Monter ce projet dans ce cadre m’a paru très opportun ; il y avait là matière à faire de cette comédie noire, grotesque, sur le sujet des violences domestiques, un spectacle très brut et d’une proximité très forte avec les spectateurs ». La fable haletante, violente, dans une langue elliptique d’une rare puissance évocatrice dont le rythme emprunte à la poésie slam, situe l’action dans une ferme isolée d’un coin de campagne. Là, trois femmes, une mère et ses deux filles, qui viennent de mettre fin à leur calvaire en tuant leur mari et père, sont confrontées au problème de la disparition de ce corps encombrant.
Macabre et cocasse
Appuyé sur la brillante traduction de Dominique Hollier, le metteur en scène réussit, en apprivoisant les difficultés techniques inhérentes à l’écriture, à rendre le texte limpide, sensible à l’extrême. Il réalise, sans avoir l’air d’y toucher, un autre tour de force, celui d’orchestrer cette conjugaison du macabre et du cocasse portée à son comble par l’auteur. Cette conjugaison particulièrement remuante est magnifiquement prise en charge par les trois actrices Dominique Hollier (la mère), Lena Garrel et Aude Rouanet (les filles). Placées dans un espace scénique tri-frontal qui les exposent sous toutes les coutures, installées sur de simples chaises d’écolier, alignées face au public, habillées de façon évocatrice pour favoriser le déploiement concret de l’imaginaire d’une ferme, à peine soutenues par un subtil jeu de lumières, elles donnent corps à cette fable magnifique et terrible dans une économie de gestes parfaitement chorégraphiés.
Marie-Emmanuelle Dulous de Méritens
A propos de l'événement
L’arbre à sangdu vendredi 2 février 2024 au samedi 10 février 2024
Le CENTQUATRE-PARIS
5 rue Curial, 75019 Paris
Les 2, 3,9 et 10 février à 18h. Tél : 01 53 35 50 00. Durée : 55mn. Spectacle vu aux Plateaux Sauvages. Dans le cadre du Festival Les Singulier.es.