Sujets à vif : les vingt ans

Déjà 20 ans, mais sans rester figé. Le projet des Sujets à vif a su traverser le temps comme il a su évoluer. Aussi a-t-on pu voir se succéder, sous l’égide de la SACD qui pilote et passe commande, différents principes, passant du Vif du Sujet aux Sujets à Vif. D’abord investie par le monde de la danse, où la possibilité était donnée à un interprète de choisir son chorégraphe, la formule s’est élargie aux artistes de toutes disciplines et la rencontre en forme de « mariage arrangé » a de plus en plus laissé sa chance au hasard. Résultat ? Parfois des pépites, souvent des expérimentations, en tout cas à chaque fois un dialogue à nul autre pareil, qu’autorisent aussi bien la règle du jeu donnée aux artistes que le lieu, porteur d’une identité forte. Cette année, huit nouvelles créations vont s’inscrire dans le Jardin de la Vierge du Lycée Saint Joseph. Le cirque rencontre le théâtre, à travers l’alliance entre Nikolaus et Joachim Latarjet, et entre Adéll Nodé Langlois et Julien Mabiala Bissila. Les danseurs ou chorégraphes occupent toujours une place de choix, mais c’est pour mieux se déplacer : Cristina Kristal Rizzo, Claudia Triozzi, Gaëlle Bourges, Michel Schweizer, Jann Gallois, Mathieu Desseigne seront aux premières loges. Et Frédéric Ferrer dans tout ça ? On se souvient de sa proposition, il y a deux ans avec Simon Tanguy, dans un tandem schizophrénique d’une belle drôlerie. Déjà, il insérait dans son Sujet à Vif un clin d’œil en forme de mise en abyme, où il analysait, en une courte séquence, la métamorphose du fameux arbre du Jardin au fil des éditions.

L’invité des invités : Frédéric Ferrer

Le voilà qui revient, à l’horaire inhabituel de 20h30 en plus de la programmation, avec la mission de célébrer les vingt ans des Sujets à Vif. Le plus décalé des conférenciers du paysage théâtral s’est amusé à retrouver les 120 Sujets à Vif précédents, à aller chercher des témoignages, à étudier le lieu même : « J’ai fait feu de tout bois en essayant de récolter toute forme d’information qui mettait en jeu soit le jardin, soit la statue (qui d’ailleurs n’était pas là pendant un certain temps), soit les Sujets à Vif », nous raconte Frédéric Ferrer. Un retour nostalgique sur vingt ans de création ? Pas vraiment : « Soit je rendais compte de toutes ces histoires qui n’ont rien à voir les unes avec les autres, soit j’en choisissais certaines dans le lot. Alors j’ai plutôt cherché à établir une grille d’analyse qui me permettrait d’identifier certains axes de questionnements de l’ensemble des formes ». L’auteur, acteur et metteur en scène revêt donc son costume de conférencier pour faire le point sur la manifestation. « Comment se fait-il que cette manifestation ait pu durer vingt ans ? Je fais l’hypothèse que c’est parce qu’elle a eu lieu dans le Jardin de la Vierge. Quelle est la nature géographique de cet endroit qui permettrait d’expliquer ce phénomène ? A partir de là tous les décalages sont possibles ! ». Sans toutefois s’éloigner de la règle du jeu des Sujets à Vif. Avec lui, c’est chaque soir, sur les douze représentations, un nouvel invité.

Nathalie Yokel