La Terrasse

"La culture est une résistance à la distraction" Pasolini

Théâtre - Entretien

Rémi de Vos

Rémi de Vos - Critique sortie Théâtre

Publié le 10 avril 2010

Noir Occident

Occident est une pièce importante pour Rémi de Vos. Une de celles qui ont le plus compté dans sa carrière, mais aussi une des plus personnelles. Cinq ans après sa création, le couple féroce qui s’invective sur fond de misère existentielle et sociale est de retour au TGP.

Vous dîtes avoir écrit cette pièce en pensant à un acteur en particulier. Au vu des personnages, on se demande de quel type d’homme il s’agissait ?
Rémi de Vos : Je l’ai écrite il y a cinq ans. C’était pour Gilles Blaise, un acteur fidèle d’Hervé Guilloteaux, un comédien qui me touchait et qui avait au fond de lui cette radicalité et cette violence que j’ai données au personnage masculin. Malheureusement, le texte a eu trop de résonances en lui. Il se jetait sur scène chaque soir comme un matador, ce qui empêchait la dimension comique du texte de se développer. Si bien que le spectacle a dû s’arrêter au bout de dix jours, faute de spectateurs.

Le texte a-t-il ensuite suivi une belle trajectoire ?
R.V. : C’est un texte écrit pour les acteurs et je reçois beaucoup de demandes d’autorisation de mise en scène. Je refuse parfois, notamment quand les comédiens sont trop jeunes. Mais le texte a été beaucoup monté et sous des formes très différentes. Au Japon, par exemple, j’en ai vu une lecture très formelle, avec un rituel de combat de mots, où les acteurs n’élevaient jamais le ton. En Italie à l’inverse, le couple était affreux, sale et méchant et entamait une crise conjugale à l’italienne.
« Le comique est un moyen de se débarrasser de quelque chose qui n’est pas drôle »

Vers quelle forme va votre préférence ?
R.V. : Vers la japonaise, sans hésitation. D’ailleurs, la mise en scène de Dag Jeanneret que j’ai eu la chance de découvrir penche plutôt dans ce sens. Il y a des intermèdes de Vivaldi et des acteurs qui ne se touchent jamais. Les deux comédiens sont extraordinaires parce qu’ils portent en même temps le tragique et le comique des personnages. Ils ont eu, je crois, une intuition immédiate du texte.

Tenez-vous particulièrement à la dimension comique du texte ?
R.V. : J’ai écrit cette pièce très rapidement, dans une phase plutôt sombre de ma vie. De toutes celles que j’ai écrites, c’est peut-être celle où j’ai mis le plus de moi. Et pour rendre cette part de moi enfouie visible et audible, cela nécessitait un rire de libération. Mais quand j’écris, le comique, je ne le travaille pas. Il vient comme ça, je ne peux pas m’empêcher. C’est un moyen, en fait, de se débarrasser de quelque chose qui n’est pas drôle.

Le titre
Occident et le racisme ordinaire du personnage masculin laissent-ils supposer que le texte porte une dimension politique ?
R.V. : Non, il n’y a pas de part politique dans ce texte. Le titre m’intéressait plus phonétiquement qu’autre chose. Même si je trouve qu’il y a dans cette détestation et cette noirceur des personnages – je me trompe peut-être – quelque chose de purement occidental. Pour reprendre une phrase d’Hubert Selby Junior, j’ai écrit ce texte en pensant « à ceux qui savent et se taisent ».
Propos recueillis par Eric Demey.


Occident de Rémi de Vos, mis en scène par Dag Jeanneret. Au Théâtre Gérard Philipe, CDN de Saint-Denis, dans le cadre du festival Vi(ll)es, du 7 au 18 avril. Relâche le lundi et mardi. Réservations au 01 48 13 70 10.

A propos de l'événement


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