Hedda Gabler
Thomas Ostermeier met en scène les affres [...]
Le comédien Philippe Baronnet signe sa deuxième mise en scène. Il crée Bobby Fischer vit à Pasadena, de Lars Norén, au Théâtre de Sartrouville. Une réussite.
Philippe Baronnet a étudié l’art dramatique au sein de la 68ème promotion de l’ENSATT, de 2006 à 2009. Au sortir de ces études, il fonde le collectif La Nouvelle Fabrique avec ses camarades d’école, collectif dont il a mis en scène le premier spectacle en janvier 2010, au Théâtre de L’Opprimé (Phénomène #3, à partir des Ecrits de Daniil Harms). C’est à la même période qu’il est engagé comme comédien permanent au Théâtre de Sartrouville, aux côtés d’Elya Birman et de Nine de Montal. Voilà pour le début de parcours de cet artiste qui confirme, avec Bobby Fischer vit à Pasadena, tout le bien que pense de lui Laurent Fréchuret, l’actuel directeur du Centre dramatique national des Yvelines (qui sera remplacé, le 1er janvier 2013, par Sylvain Maurice). Car la mise en scène de la pièce de Lars Norén que signe aujourd’hui Philippe Baronnet évite non seulement le piège des complaisances de jeunesse, mais également celui d’une vision trop platement réaliste et psychologique du théâtre de Lars Norén. Les quatre interprètes (Elya Birman, Samuel Churin, Nine de Montal et Camille de Sablet), réunis au sein de l’espace quadrifrontal conçu par Estelle Gautier, rendent en effet compte avec force et violence de cette œuvre profondément désespérée.
Le risque incessant du chaos
Il est question ici d’une famille en péril. D’une famille au bord du précipice, en équilibre, toujours à deux doigts du chaos. Le père et la mère se sentent vieillir, ils se sont un jour éloignés et peinent à renouer les liens du corps. Le fils, atteint d’une pathologie mentale, est de retour à la maison après avoir séjourné dans un établissement psychiatrique. La fille est alcoolique et ne s’est jamais remise de la mort de son petit enfant. Enoncé ainsi, on peut trouver le tableau un peu lourd. Mais c’est sans compter le talent de Lars Norén qui, à travers un savant dosage de dits et de non-dits, de mises en lumière et d’ellipses, nous bouscule et nous projette dans un climat de tension quasi permanente. Tout cela est d’une justesse percutante. Et puis, il y a la mise en scène aux accents cinématographiques de Philippe Baronnet. Elle nous place au plus près de ces lames de fond, joue de gros plans, d’effets de perspectives, s’appuie sur une remarquable direction d’acteur. Quelque chose d’organique se dégage du spectacle. Quelque chose de terrien, d’entier, qui ne cherche jamais à s’en sortir à bon compte, qui nous oblige à regarder, les yeux dans les yeux, les répétitions inexorables de ces ébranlements.
Manuel Piolat Soleymat
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