Neige noire
Spectacle sur la vie de Billie Holiday, Neige [...]
Comédienne de très grand talent, Nathalie Richard donne corps à l’écriture singulière d’Haruki Murakami et interprète une femme entre monde réel et monde onirique, au fil d’un quotidien bouleversé par les nuits blanches et les pouvoirs de l’imagination. Hervé Falloux signe l’adaptation et la mise en scène de la nouvelle.
Quel est votre regard sur l’écriture de Haruki Murakami, et en particulier sur cette nouvelle ?
Nathalie Richard : Avant les répétitions, j’avais lu plusieurs livres d’Haruki Murakami (Après le tremblement de terre, Le passage de la nuit, Kafka sur le rivage). Ses livres posent la question de la liberté : comment être libre dans un monde qui impose énormément de contraintes économiques et sociales ? Murakami parle aussi de la nécessité de l’âme… ou plutôt de comment ne pas perdre son âme, si tant est qu’elle existe. Ses personnages – comme celui que j’interprète dans Nuits Blanches – sont confrontés à la solitude, pour eux c’est un état nécessaire, salutaire. Il emploie un vocabulaire simple, accessible à tous. Son écriture travaille sur la sensation du temps, sur la coexistence du monde réel et d’un monde onirique, car ses personnages vivent simultanément le quotidien et une vie imaginaire.
« L’écriture travaille sur la sensation du temps, sur la coexistence du monde réel et d’un monde onirique. »
Comment appréhendez-vous le rôle de cette femme qui désire si fortement échapper à son quotidien ?
N. R. : Je dirais que c’est une femme qui plutôt que d’échapper seulement à son quotidien, tente de retrouver des souvenirs lointains, un monde imaginaire enfoui, et une possibilité infinie de retrouver des sensations à travers la lecture. Elle accède ainsi à une vraie lucidité sur elle et sur le monde.
Comment passer d’une écriture littéraire à une forme orale ?
N. R. : Hervé Falloux a choisi de transformer cette nouvelle en un monologue. Une seule personne est donc en charge de recréer l’univers de Murakami ! Nous faisons un travail rythmique et sensible. Nous travaillons aussi sur les images, les situations évoquées par le texte, et sur une concentration, une disponibilité qui permettent parallèlement de raconter cette histoire et de la vivre. La forme est un aller retour entre le réel et l’irréalité. Un rythme, un mouvement permettent de dire cet entre-deux. Jean-Michel Adam a créé un décor abstrait avec des éléments qui évoluent indépendamment tout au long du spectacle. Philippe Sazerat propose une lumière qui accompagne le trouble de cet entre-deux entre le réel et l’onirisme, entre le calme apparent et une grande violence souterraine.
Diriez-vous que cette femme accomplit un parcours initiatique à travers son “escapade“ et ses nuits blanches ?
N. R. : Oui certainement. Un voyage initiatique vers la liberté, la connaissance de soi. Peut-être aussi une méditation, un rêve… en tout cas une course de fond ou une course d’obstacles.
Est-ce aussi une célébration des capacités artistiques de l’homme que Murakami met en oeuvre ?
N. R. : Sans aucun doute. Mais aussi l’affirmation de ne pas perdre sa capacité d’imagination. C’est elle qui peut nous mener vers l’art. Nous avons des capacités intellectuelles, mentales, sensibles, émotionnelles beaucoup plus vastes que nous le pensons.
Propos recueillis par Agnès Santi
Du mardi au vendredi à 19h, samedi à 16h et dimanche à 18h. Tél. : 01 44 53 88 88.
Spectacle sur la vie de Billie Holiday, Neige [...]