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Théâtre - Entretien

Nasser Djemaï prend la tête du Théâtre des Quartiers d’Ivry

Nasser Djemaï prend la tête du Théâtre des Quartiers d’Ivry - Critique sortie Théâtre Ivry-sur-Seine Manufacture des Œillets
© Luc Jennepin Nasser Djemaï

Publié le 20 août 2021 - N° 291

Directeur du Théâtre des Quartiers d’Ivry depuis janvier dernier avec Anne-Françoise Geneix, l’auteur, comédien et metteur en scène Nasser Djemaï entend en faire une maison engagée sur son territoire et au service des auteurs vivants, en particulier des auteurs-metteurs en scène.

En quoi prendre la direction du Théâtre des Quartiers d’Ivry s’inscrit-il dans la logique de votre parcours d’artiste ?

Nasser Djemaï : Depuis ma première création en 2003, Une étoile pour Noël, je me suis essentiellement concentré sur ma propre écriture et sur la structuration de ma compagnie. J’avais envie d’aller à la rencontre d’autres gestes artistiques que le mien, de me mettre à leur service. J’avais aussi à cœur d’œuvrer à la transmission et d’aller plus loin dans le travail de territoire que ce que l’on peut faire avec une compagnie indépendante. Or le Théâtre des Quartiers d’Ivry est le lieu avec lequel j’ai l’histoire la plus forte. Alors directeurs du lieu, Adel Hakim et Elisabeth Chailloux m’ont offert un espace de répétition pour Une étoile pour Noël, qu’ils ont ensuite programmée en 2005. Ils ont aussi accueilli mes créations suivantes, Invisibles et Vertiges, et j’ai été artiste associé à la saison 2016-2017, année où j’ai inauguré la petite salle du Lanterneau. Il a donc été évident pour moi de proposer ma candidature.

Vous affirmez le désir de faire du TQI une « fabrique des imaginaires ». Concrètement, comment cela s’exprime-t-il ?

N.D. : Déjà par la présence de quatre autrices-metteures en scène associées : Pauline Bureau, Estelle Savasta, Tamara Al Saadi et Élise Chatauret, dont j’aime les écritures singulières, complémentaires entre elles. Nous les accompagnerons sur un temps long, depuis la naissance d’une œuvre jusqu’à sa réalisation. Libres de développer les sujets et les méthodes de création qui leur correspondent, elles contribueront aussi à notre ancrage sur le territoire. Cela notamment en travaillant avec des groupes et des lieux divers – Estelle Savasta mènera par exemple des ateliers en prison – et en intervenant au sein de l’Atelier théâtral d’Ivry, où 200 amateurs pratiquent chaque année le théâtre auprès de professionnels. Cet outil est très précieux en matière de transmission ; j’entends donc le préserver comme élément central de l’identité du TQI. Pour nourrir notre « fabrique des imaginaires », nous mettons aussi en place une maison d’auteurs dirigée par le comédien et metteur en scène Thierry Blanc. Le lauréat sera accompagné par notre équipe en production et en diffusion.

« Je souhaite un théâtre ouvert sur la ville, en dialogue avec ses imaginaires. »

Comment avez-vous construit votre programmation, dans ce contexte de Covid ?

N.D. : Nous avons décidé le report d’une partie de la programmation de la saison précédente, conçue par le directeur par intérim du lieu Licinio Da Costa et son équipe. Nous avons en priorité choisi de reprendre les créations, ce qui représente environ un tiers de notre programme global, que nous construisons pour le moment de manière trimestrielle. La crise sanitaire nous a fait prendre conscience de la fragilité de nos métiers, de la nécessité de nous adapter. Nous affirmons toutefois déjà plusieurs lignes de direction, parmi lesquelles l’ouverture à différentes disciplines, comme la danse et la marionnette. Nous misons aussi beaucoup sur l’itinérance : cette saison, deux spectacles iront à la rencontre des habitants, dans leurs lieux de vie quotidiens. Autour de sa prochaine création, Emmanuel Meirieu va aussi travailler avec des habitants. Et dès la rentrée, pour notre week-end d’ouverture des 24 et 25 septembre, nous commençons un partenariat avec le beau festival « Tournée Générale », qui invite le théâtre dans des bars de quartier. Je souhaite un théâtre ouvert sur la ville, en dialogue avec ses imaginaires.

Pendant ce week-end d’ouverture, vous allez aussi vous présenter au public du TQI avec votre spectacle Héritiers. Pourquoi ce choix ?HéHU

N.D. : Avec Héritiers, qui est ma dernière création, je me présente tel que je suis aujourd’hui en matière d’écriture et de mise en scène. Depuis Une étoile pour Noël, je décline la notion de frontières de manières diverses. Dans Vertiges (2017), je questionne notamment celles qui séparent le visible de l’invisible. Je poursuis dans cette voie avec Héritiers, où je m’intéresse pour la première fois à un groupe socio-culturel éloigné du mien : la bourgeoisie. Mais on y retrouve les mêmes motifs que dans mes autres spectacles : l’absence, la difficulté à trouver sa place. Je présenterai plusieurs pièces de mon répertoire au cours de la saison, tandis que ma prochaine pièce, Les Gardiennes, sera créée en janvier 2022. Pour continuer le dialogue.

Propos recueillis par Anaïs Heluin

A propos de l'événement

Nasser Djemaï prend la tête du Théâtre des Quartiers d’Ivry
Manufacture des Œillets
1 place Pierre Gosnat, 94200 Ivry-sur-Seine.

Tel : 01 43 90 11 11. www.theatre-quartiers-ivry.com

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