Sombre printemps
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Le Bharata Nâtyam, une danse féminine ? Raghunath Manet, depuis près de trente ans, renouvelle notre vision de cette danse classique de l’Inde du Sud et, plus largement, de la culture indienne.
Raghunat Manet est connu depuis les années 1980 en tant que danseur, chorégraphe et musicien (il joue de la vînâ, le plus ancien des instruments indiens à cordes frettées). Il est également un intarissable pédagogue, qui, ayant lui-même appris la danse auprès de grands maîtres – Sri Nathan de Pondichéry, Ram Gopal et les maîtres de l’Académie Kalakshetra, dont il est sorti diplômé en 1987 – a ensuite ouvert une école et formé toute une génération de danseurs. Il a ainsi, à de nombreux titres, intensément contribué à la reconnaissance mondiale du Bharata Nâtyam : ces gestes aussi précis que foisonnants, ces poses mystérieuses et profondément évocatrices, ces appuis au sol déroutants sont aujourd’hui reconnus comme l’un des joyaux du patrimoine chorégraphique planétaire. Raghunat Manet a en outre redonné ses lettres de noblesse à la danse masculine, alors que le Bharata Nâtyam a longtemps été enseigné principalement aux jeunes filles. Le chorégraphe rappelle avec humour que la divinité Shiva, le roi de la danse, est un homme…
Des collaborations prestigieuses
Mais non content de donner une visibilité mondiale à cet art ancestral, Raghunat Manet en est aussi l’un des rénovateurs, qui sait le confronter à des démarches originales. Car c’est souvent sur le mode de la rencontre que cette réinterrogation du patrimoine s’est incarnée. On a ainsi pu le voir danser en duo avec Carolyn Carlson, créer un spectacle unissant le jazz, la musique et la danse indiennes avec Archie Shepp ou Michel Portal, partager la scène avec Richard Galliano ou encore, la saison dernière, avec Didier Lockwood… Lors des représentations qu’il s’apprête à donner à l’Institut du Monde Arabe, c’est avec le violoniste tunisien Jasser Haj Youssef qu’il nous invite à un voyage entre deux cultures : Mughul India nous fait cheminer entre des morceaux festifs, des chants dévotionnels, des rythmes contrastés. Les grelots attachés aux chevilles du danseur répondent à la mélodie lyrique du violon, ainsi qu’aux rythmes obsédants du percussionniste indien Murugan. Une danse et une musique à la fois puissantes et sensuelles, douces et irrésistibles, par des artistes qui sont sans doute, aujourd’hui, au sommet de leur art.
Marie Chavanieux
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