La Terrasse

"La culture est une résistance à la distraction" Pasolini

Classique / Opéra - Critique

L’Opéra de quatre notes

L’Opéra de quatre notes - Critique sortie Classique / Opéra Amiens Comédie de Picardie
L'Opéra de quatre notes de Tom Johnson, mise en scène Gilles et Corinne Benizio. © Didier Pallages

Région / en tournée / de Tom Johnson / mes Corinne et Gilles Benizio
Critique

Publié le 21 décembre 2015 - N° 238

A la demande des chanteurs de l’Atelier lyrique de Franche-Comté, Gilles et Corinne Benizio s’emparent de cette œuvre jubilatoire, drôle et exigeante. Un excellent moment !

Une fois n’est pas coutume : bienvenue dans les coulisses et l’envers du décor d’une oeuvre exigeante entre toutes, l’opéra ! Un opéra où les cinq rôles vocaux ne content pas d’histoire grandiose, mais font entendre leurs doutes, griefs, frustrations et joies sur le chant et leur prestation vocale. « Le ténor n’a presque rien à dire », déplore ainsi le ténor désabusé, tandis que la contralto est ravie de chanter son aria « parce qu’elle adore… chanter ». « Je suis plutôt en forme ce soir », lance un autre. Tout cela en utilisant seulement quatre notes – la, si, ré, mi -, même si cette restriction n’est pas pour nous discernable, mais qu’importe ! Le sujet de l’opéra est simplement l’opéra même que les protagonistes sont en train de chanter, ce qui donne lieu à de savoureux jeux de miroirs et à une quête artistique drolatique d’une résonance toute pirandellienne. Ils sont donc six. Un pianiste, la soprano, la contralto, le ténor, le baryton et la basse (apparition plutôt furtive), qui mettent en forme un opéra de chambre jubilatoire et virtuose avec récitatifs, airs, ensembles et chœurs.

Drôle et caustique

Et on se régale du contraste entre la précision et la rigueur mathématiques de la musique, qui exerce une sourcilleuse emprise, et le comique burlesque et absurde d’un livret qui, surtout, ne se prend pas au sérieux. Entre les contraintes de la composition et les sursauts de l’ego. Le comique de répétition fait mouche à chaque fois. Quelle tyrannie que cette partition, que les chanteurs évidemment ne peuvent contrecarrer malgré leurs désirs ! Aux manettes, Gilles et Corinne Benizio, déjà metteurs en scène d’opéras dirigés par Hervé Niquet, réussissent une mise en scène joyeuse et rigoureuse, s’inspirant de l’esthétique des années 70 et des illustrations du livre Imaginary Music de Tom Johnson. C’est à la demande des chanteurs de l’Atelier Lyrique de Franche-Comté qu’ils ont investi cette œuvre drôle et caustique, que les chanteurs avaient eux-mêmes interprétée avec succès de 2003 à 2008, sous la houlette du baryton et metteur en scène Paul-Alexandre Dubois. On le retrouve dans le rôle du baryton – en alternance avec Vincent Bouchot -, aux côtés de Mélanie Boisvert en alternance avec Sevan Manoukian (la soprano), Eva Grüber (la contralto), Christophe Crapez (le ténor), Gilles Bénizio (la basse), et Nicolas Ducloux au piano. Conjuguant jeu des voix et jeu théâtral, tous déploient un opéra à la fois exigeant et populaire, très apprécié par les néophytes autant que par les initiés.

Agnès Santi

A propos de l'événement

L’Opéra de quatre notes
du mardi 12 janvier 2016 au vendredi 13 mai 2016
Comédie de Picardie
62 Rue des Jacobins, 80000 Amiens, France

Espace Jean Legendre à Compiègne (60), le 12 janvier. Conservatoire Jean-Baptiste Lully à Puteaux (92), le 18 mars. Espace Saint André à Abbeville (80), le 3 mai. Salle de la Bonnette (via La Barbacane de Beynes), La Queue-les-Yvelines (78), le 13 mai. Spectacle vu à la Comédie de Picardie lors de sa création en novembre 2015. Durée : 1h10.

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