Entretien / Dominique Pitoiset
Région
THEATRE NATIONAL BORDEAUX AQUITAINE
Cyrano de Bergerac / d’Edmond Rostand / adaptation et mes Dominique Pitoiset
Publié le 25 janvier 2013 - N° 206
Le pacte faustien de Cyrano Après Qui a peur de Virginia Woolf ?, Mort d’un commis voyageur et Merlin ou La Terre dévastée, Dominique Pitoiset met en scène Cyrano de Bergerac avec, dans le rôle-titre, Philippe Torreton.
Accroche : « Cyrano questionne l’être à la fois dans son essence et dans ses pulsions. »
Comment est née l’idée de mettre en scène Cyrano de Bergerac avec Philippe Torreton ?
D. P. : Sur un quiproquo. Philippe et moi nous connaissons depuis très longtemps. Voilà des années que nous avons envie de travailler ensemble. Un jour, il m’a demandé de relire Cyrano. Et quand je l’ai rappelé pour lui parler de ma lecture, il m’a dit qu’il ne m’avait pas demandé de relire Cyrano, mais Figaro ! Nous nous sommes alors mis à parler de la pièce de Rostand et avons décidé de nous lancer ensemble dans cette aventure. Pourtant, je dois dire qu’avant de la relire, j’étais rempli d’a priori sur Cyrano. Cette pièce, avec ses duels, ses références, toutes les images qui lui collent à la peau, me paraissait très poussiéreuse.
Qu’est-ce qui a eu raison de ces a priori ?
D. P. : En relisant attentivement la pièce, je me suis aperçu que derrière cette impression de poussière, il y avait des choses réellement magnifiques, des choses jubilatoires. Car quel personnage que ce Cyrano ! Quel cousin d’Alceste, mon héros, atrabilaire amoureux ! Un cousin d’Alceste qui engage un pacte faustien. En la personne de Christian, Cyrano crée en effet un avatar dont il sera l’esprit, le souffle poétique, la voix… Mais ce pacte aboutira à la mort des deux protagonistes. Plus que d’éclairer la notion de panache, ce qui m’intéresse dans Cyrano de Bergerac, c’est de faire entendre une certaine forme d’esprit français : le « être seul mais libre », l’insoumission, le « non, merci ! », la revendication de l’endroit juste du chemin parcouru, le point de vue sur l’engagement…
Qu’est-ce qui vous touche particulièrement dans le personnage de Cyrano ?
D. P. : C’est qu’il questionne l’être à la fois dans son essence et dans ses pulsions. Cyrano a tous les symptômes du maniaco-dépressif, il fonctionne par ruptures et par cycles. Il manifeste, tour à tour, un appétit boulimique pour les mots, pour les paroles flamboyantes, pour les prises de risque, et une profonde mélancolie, une nature traversée par des humeurs sombres. Je trouve cette mélancolie absolument bouleversante. Je crois que mon amour pour Cyrano naît de cette grande solitude, et du défi que sa personnalité lance à la raison raisonnable.
Entretien réalisé par Manuel Piolat Soleymat
A propos de l'événement
Cyrano de Bergeracdu mercredi 20 février 2013 au samedi 2 mars 2013
Théâtre National de Bordeaux en Aquitaine
3 Place Pierre Renaudel 33800 Bordeaux
Du 20 février au 2 mars 2013 au Théâtre National de Bordeaux Aquitaine 3 Place Pierre Renaudel 33800 Bordeaux. Tél 05 56 33 36 60. www.tnba.org/