Rosa Luxemburg Kabarett
Viviane Theophilidès a choisi la forme du [...]
Pour raconter le XXIème siècle à sa manière tendre et décalée, Gilles Cailleau fait appel dans Le Nouveau Monde à tous ses talents d’acteur et de circassien. Il joue à Avignon lors de quatre représentations exceptionnelles.
Il a traversé tout Shakespeare en trois heures dans Le tour complet du cœur (2002), présenté Tout l’univers en plus petit (2009) sous forme de cirque forain miniature, ou encore interprété seul dans Gilles et Bérénice (2011) une version très personnelle de Bérénice de Racine… Pourtant, lorsque Gilles Cailleau décide de s’atteler à une « histoire générale et poétique du XXIème siècle », sous-titre de son nouveau spectacle, il se sent bien seul. Presque aussi démuni qu’un enfant. Avec quel langage dire toutes les violences et les injustices de ces dernières années ? Et ce qu’il reste malgré tout d’espoir ? Au milieu des spectateurs installés en cercle sur des sièges dépareillés, l’auteur, comédien, acrobate, metteur en scène et en piste de la Compagnie itinérante Attention Fragile rumine les questions qu’il s’est posées pendant la création du Nouveau Monde. « Parce qu’on ne peut pas raconter une histoire titubante et encore inconnue sans des tâtonnements et une fragilité d’équilibriste ».
Chronique d’un siècle mal né
Dans son dossier de présentation, Gilles Cailleau ne cite pas Rilke par coquetterie. « Cela nous submerge, nous l’organisons, cela tombe en morceaux. Nous l’organisons de nouveau et nous tombons nous-mêmes en morceaux. » Ces phrases renseignent mieux que toute autre sur la teneur du spectacle. Succession de tableaux vivants consacrés à des tragédies récentes, Le nouveau Monde a en effet la virtuosité on ne peut plus paradoxale. Face au siècle, la parole épique et le répertoire d’acrobaties de l’artiste ne peuvent pas grand-chose. Mais pas question de se dégonfler. Prêt à tout pour rester vertical et formuler au mieux son désarroi, Gilles Cailleau s’accroche à des planches, se jette les mains jointes dans le trou d’un grillage éventré, lance des couteaux sur des poupées enflammées… Le clown n’est pas loin. En plein milieu du spectacle, après l’écroulement de tours jumelles en feuilles de contreplaqué et autres tragédies bricolées, il s’invite même carrément sur la piste. Aussi drôle et déchirant que l’ensemble de ce Nouveau Monde tout en sueur et en poésie.
Anaïs Heluin
à 22h30. Tel : 04 90 85 15 14.
Viviane Theophilidès a choisi la forme du [...]