Le Grand Bain, festival initié par Le Gymnase
Avec Le Grand Bain, Le Gymnase, CDCN de [...]
Loin d’être une énième version du Lac des cygnes, le chorégraphe tunisien Radhouane El Meddeb livre une vision très personnelle de l’œuvre.
Confier au chorégraphe contemporain Radhouane El Meddeb une relecture du Lac des Cygnes pour les trente-deux danseurs du Ballet du Rhin était, de la part de son directeur, Bruno Bouché, un peu « gonflé ». Cette association était de fait un genre de manifeste pour signifier « la démolition des dogmes ». Mais il est des œuvres qui résistent à toute destruction, et Le Lac des Cygnes est l’une d’elles. Radhouane El Meddeb s’est bien gardé d’en prendre le chemin. Au contraire, on peut lire dans sa chorégraphie un étonnant travail d’analyse des strates qui composent ce chef-d’œuvre, aussi bien au niveau du vocabulaire qu’au plan symbolique ou imaginaire. Car ce ballet s’inscrit dans un inconscient collectif quasi mondialisé au point de représenter à lui seul toute la danse classique. Traitant la chorégraphie à la manière d’un palimpseste, Radhouane El Meddeb a commencé par effacer les différents actes qui trament le récit et ses rebondissements pour en faire une sorte de longue rêverie d’où émergeraient les emblèmes du ballet.
Un Lac très démocratique
Enfin, et c’est toute l’intelligence de cette version, apparaissent les véritables enjeux du Lac des cygnes : le désir d’envol et d’animalité que porte chaque danseur, sa passion d’être un autre, et bien sûr, la sexualité, dont cet oiseau s’est fait le mythologique champion mâle et femelle. On a particulièrement apprécié la subtile intention démocratique inscrite dans les lignes mêmes de la chorégraphie d’El Meddeb. Au lieu de faire voir l’ordre à travers des ensembles tirés au cordeau et répétant à l’unisson un même mouvement ad libitum, il a réparti les danseurs sur le plateau comme autant d’individus, échangeant des regards, se jaugeant en arpentant l’espace, se frôlant sans se rencontrer, évitant le contact direct, étrangers l’un à l’autre mais toujours solidaires. La légèreté des costumes de Celestina Agostino, la précision du coup de baguette du jeune chef iranien Hossein Pishkar, la magnifique scénographie d’Annie Tolleter, sans oublier les lumières d’Eric Wurtz, font de ce spectacle une belle réussite.
Agnès Izrine
Mer. 27, ven. 29 à 20h30, jeu. 28 à 19h45, sam. 30 à 15h30. Tél. : 01 53 65 30 00. Durée : 1h30. Egalement du 22 au 24 mars au Manège de Reims. Vu à la création, le 13 janvier 2019, Opéra du Rhin, Strasbourg.
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