La Terrasse

"La culture est une résistance à la distraction" Pasolini

Théâtre - Critique

L’Apprentissage

L’Apprentissage - Critique sortie Théâtre
Crédit photo : 2008 i-fou-lepolemedia. Légende photo : Dans L’Apprentissage, Alain Macé fait de son corps le lieu du texte.

Publié le 10 octobre 2008

Dirigé par Sylvain Maurice, Alain Macé interprète avec autant d’intensité que d’intelligence le texte où Jean-Luc Lagarce fait le récit d’une sortie du coma qui a tout d’une invention de la subjectivité.

L’Apprentissage est le résultat d’une commande passée en 1993 à Jean-Luc Lagarce par Roland Fichet qui lui demandait un « récit de naissance ». Le résultat tient plutôt en un « récit de renaissance » comme le remarque Sylvain Maurice, metteur en scène de cette étonnante découverte d’un sujet par lui-même dont l’esprit se libère progressivement de la gangue corporelle qui l’emprisonne et le réduit, pour réapprendre petit à petit à être humain. De la première paupière ouverte à la première sortie autorisée de l’hôpital, dans l’air et la lumière de l’été, « celui qui raconte » dit l’étonnant, le balbutiant, le glorieux et le misérable de ces quelques semaines passées à comprendre progressivement que l’existence est la forme de la vie. D’un corps machine, ou « sac », fait de membres et d’organes désunis au début, émerge progressivement un individu autonome et une personne restaurée dans son langage et réinstallée dans l’intersubjectivité.
 
Le corps comme une scène
 
Sylvain Maurice choisit un traitement théâtral qui évite avec habileté et pudeur les pièges du réalisme hospitalier. Alain Macé, seul, fragile et comme égaré au cœur de l’hétérotopie médicale sans repères de l’immédiate sortie du coma, retrouve le monde et ses objets comme s’il redécouvrait en même temps le langage et ses possibilités créatrices. Entre inspiration beckettienne et faux airs de Valentin le désossé, le comédien mime le corps apprivoisant ses prouesses et son environnement comme le ferait un paralytique soudain miraculé. Au fur et à mesure de la guérison et des progrès, le ton et les membres s’assouplissent, le sourire adoucit le rictus, l’homme remplace le pantin, le dynamisme transcende le mécanisme. Alain Macé dit le texte de Lagarce avec autant de précision que de force, ciselant chaque réplique pour lui donner tout son sens. L’art du comédien est parfaitement maîtrisé et la prouesse scénique est remarquable.
 
Catherine Robert


L’Apprentissage, de Jean-Luc Lagarce ; mise en scène de Sylvain Maurice. Du 19 août au 25 octobre 2008. Du mardi au samedi à 19h. Les Déchargeurs, 3, rue des Déchargeurs, 75001 Paris. Réservations au 08 92 70 12 28.

A propos de l'événement


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