La Terrasse

"La culture est une résistance à la distraction" Pasolini

Théâtre - Critique

L’Amant de Harold Pinter, mis en scène de Margaret Clarac et Alexandre Cattez

L’Amant de Harold Pinter, mis en scène de Margaret Clarac et Alexandre Cattez - Critique sortie Théâtre Paris Le Guichet Montparnasse
Margaret Clarac et Alexandre Cattez dans L’Amant. Crédit : DR

de Harold Pinter / mes Margaret Clarac et Alexandre Cattez

Publié le 26 novembre 2019 - N° 282

Margaret Clarac et Alexandre Cattez interprètent et mettent en scène, au Guichet Montparnasse, L’Amant de Harold Pinter. Une création qui, quoiqu’inégale, rend compte de la virtuosité de la comédie écrite, en 1962, par l’auteur britannique lauréat du Prix Nobel de littérature 2005.

On imagine aisément la charge subversive qui devait surgir de L’Amant lorsque le metteur en scène britannique Michael Codron créa la pièce de Harold Pinter (1930-2008), à L’Arts Theatre de Londres, en 1963. Deux ans plus tard, au Théâtre Hébertot, Claude Régy fit découvrir au public parisien cette œuvre sur l’intimité d’un couple qui cherche à déjouer les pièges de la quotidienneté en s’inventant une vie d’époux infidèles (œuvre alors présentée aux côtés d’un autre texte bref du dramaturge, La Collection). La distribution réunie pour cette première version française laisse rêveur : Jean Rochefort dans le rôle de Richard, Delphine Seyrig dans celui de Sarah et Bernard Fresson dans celui de John. Aujourd’hui, c’est au Guichet Montparnasse que l’existence de ce ménage fantasque se dévoile, à la faveur d’un spectacle conçu par ses deux principaux protagonistes : Margaret Clarac et Alexandre Cattez (Sébastien Bourbon et Jean Hautepierre incarnent, en alternance, le personnage secondaire de John). Au sein de la petite salle du quatorzième arrondissement, au plus près des spectatrices et spectateurs, les deux comédiens évoluent sur un plateau quasi vide, signant une mise en scène centrée sur le jeu et l’incarnation.

Ménage à quatre

Deux fauteuils, deux tables basses, deux verres, une bouteille de whisky… : c’est donc dans un espace rejetant tout point d’appui naturaliste superflu qu’apparaissent Richard et son épouse Sarah. S’invite dans cette vie de couple bourgeois un troisième personnage – Max, l’amant de Sarah – qui n’est autre que Richard lui-même. Certains après-midis, ce dernier change en effet d’identité pour rejoindre celle qui est censée être sa maîtresse. Cette fiction amoureuse ne joue d’aucune cachotterie : Richard étant au courant que Sarah a un amant, Sarah que Richard voit de son côté une prostituée. Mais le jour où Richard demande à son épouse de rompre avec Max, cette vie matrimoniale en apparence parfaitement réglée vole en éclats… Plus de cinquante ans après sa création, cette réflexion sur les états possibles du couple et sur les sentiers de traverse pouvant contribuer à sa stabilité, voire à sa survie, n’a rien perdu de sa force. On est saisi par la richesse des diverses mises en abyme auxquelles donnent ici corps Alexandre Cattez et Margaret Clarac. Et si l’interprétation de la comédienne gagnerait parfois à davantage de sobriété, la performance du comédien, d’une profonde justesse, assoit la réussite du projet. Car l’acuité de l’écriture de Pinter est bien là. Toutes les strates de son audace se déploient, élaborant une matrice théâtrale captivante : entre réalité et imaginaire.

Manuel Piolat Soleymat

A propos de l'événement

L’Amant de Harold Pinter, mis en scène de Margaret Clarac et Alexandre Cattez
du vendredi 8 novembre 2019 au dimanche 5 janvier 2020
Le Guichet Montparnasse
15 rue du Maine, 75014 Paris

Les vendredis et samedis à 20h30, les dimanches à 16h30. Durée de la représentation : 1h05. Tél. : 01 43 27 88 61. www.guichetmontparnasse.com

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