La Terrasse

"La culture est une résistance à la distraction" Pasolini

Théâtre - Entretien

La Source des saints de John Millington Synge mes Michel Cerda

La Source des saints de John Millington Synge mes Michel Cerda - Critique sortie Théâtre Gennevilliers T2G
©Michel Nicolas

T2G - Théâtre de Gennevilliers / de John Millington Synge / texte français de Noëlle Renaude / mes Michel Cerda

Publié le 19 décembre 2018 - N° 272

Martin et Mary étaient pauvres, aveugles et heureux jusqu’à ce qu’ils recouvrent la vue et découvrent le monde… Michel Cerda choisit le texte français de Noëlle Renaude et revisite Synge en l’éclairant par l’écoute !

Pourquoi choisir la traduction de Noëlle Renaude ?

Michel Cerda : Cette traduction non encore éditée va sortir à l’occasion de la création du spectacle aux Editions Théâtrales. Je ne l’ai pas commandée à Noëlle Renaude – elle l’avait réalisée à une autre occasion – mais j’ai été d’emblée conquis par son travail quand elle me l’a envoyé. C’est dans cette traduction que je voulais monter le texte. Noëlle Renaude est restée au plus près de la langue de Synge, qui n’est ni de l’anglais, ni de l’irlandais, peut-être plus proche du gaélique, mais surtout qui est une langue singulière, créée par lui. Cette traduction cherche à s’approcher de cette langue monosyllabique, en respectant sa longueur et sa respiration. Le texte que j’ai choisi n’est pas une adaptation qui chercherait à créer une langue qui serait équivalente à celle de Synge. C’est impossible. Disons, plutôt, qu’il s’agit d’un texte français singulier, écrit par Noëlle Renaude, considérée en tant qu’auteur !

Que raconte La Source des saints ?

M.C. : C’est l’histoire d’un couple d’aveugles. Ils ont un peu vu, il y a longtemps. Ils passent leur vie à mendier. Mais ils ont le désir de voir le monde, car les voyants leur disent qu’il est beau. Ils s’aiment et se trouvent beaux, eux-mêmes. Mais puisqu’ils le veulent, on va le faire ! C’est la vertu du théâtre ! Ils acceptent les effets de la source miraculeuse, car ils ont envie d’aller vers la certitude et la vérité. Mais c’est la catastrophe ! Ils se voient, voient le monde et sont horrifiés. On leur a promis la beauté du monde mais ils découvrent la laideur, la prison du travail et la peine…

« L’œuvre de Synge est davantage mythologique que folklorique. »

Pourquoi cette pièce ?

M.C. : La réalité de ces deux aveugles est sonore (les bruits, les oiseaux) ; ils n’ont pas besoin de la vision pour que le monde existe. En voyant, ils s’aveuglent. S’aveugler, c’est un acte qu’on fait tous les jours. L’aveuglement est différent de la cécité. L’aveuglement est un acte qui consiste à se compromettre, et à faire des compromissions avec soi-même. L’œuvre de Synge est davantage mythologique que folklorique. Le forgeron, c’est Vulcain ; la forge, c’est les Enfers. Le paradis des aveugles devient l’enfer quand ils recouvrent la vue.

Quels acteurs avez-vous choisis ?

M.C. : J’ai choisi des acteurs qui avaient des voix singulières. Je suis très sensible aux voix au théâtre. Anne Alvaro accompagne depuis longtemps ce projet, ainsi que Yann Boudaud et Christophe Vandevelde. J’ai fait une distribution vocale, polyphonique, avec des voix particulières. J’avais aussi envie de poser la question suivante : est-ce que le son ça se voit ? C’est vraiment un projet qui tourne autour de ce qu’on voit, de ce qu’on entend, dans un espace sonore et musical (jusqu’à la scénographie, au sol métallique), dans une langue aux échos et aux répétitions sonores, qui rappelle peut-être que Synge lui-même était musicien.

Propos recueillis par Catherine Robert

A propos de l'événement

La Source des saints de John Millington Synge mes Michel Cerda
du dimanche 20 janvier 2019 au jeudi 24 janvier 2019
T2G
41, avenue des Grésillons, 92230 Gennevilliers

Lundi, jeudi et vendredi 20h, samedi à 18h et dimanche à 16h. Tél. : 01 41 32 26 26.

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