La Terrasse

"La culture est une résistance à la distraction" Pasolini

Classique / Opéra - Entretien

Kazushi Ono

Kazushi Ono - Critique sortie Classique / Opéra
Crédit photo : Akira Kinoshita

Publié le 10 février 2008

Intelligence et modernité

Sa nomination a été amplement saluée par le milieu musical. Kazushi Ono prendra les rênes de l’Orchestre de l’Opéra de Lyon à partir de septembre 2008. Auparavant, il aura présidé avec succès à la destinée de l’Orchestre de la Monnaie de Bruxelles. Mais n’allez pas le ranger dans la case des chefs d’opéra ! Le grand talent de Kazushi Ono est de pouvoir diriger aussi bien un chef-d’œuvre du bel canto qu’une partition symphonique. Ce mois-ci, il est à Paris pour diriger à la fois l’opéra Cardillac d’Hindemith à Bastille et un programme de musique du XXème siècle avec l’Orchestre Philharmonique de Radio-France.

 « Cardillac est un ouvrage passionnant, qui reflète à merveille les années 20. L’écriture musicale mélange des motifs atonaux à des éléments de jazz, et parodie même Wagner. »
 
Quel rapport entretenez-vous avec Cardillac que vous dirigez à l’Opéra Bastille ?
 
Kazushi Ono : J’ai été l’assistant de Wolfgang Sawallisch, lorsqu’il a dirigé cet opéra à Münich en 1985 dans la mise en scène de Jean-Pierre Ponnelle. C’est un ouvrage passionnant, qui reflète à merveille les années 20. L’écriture musicale mélange des motifs atonaux à des éléments de jazz, et parodie même Wagner. La partition garde toutefois une cohérence car elle se base constamment sur des formes baroques, avec des thèmes canoniques, des passacailles… Ce qui est impressionnant dans la production de Bastille, c’est de voir combien le chanteur qui incarne le rôle-titre, Franz Grundheber, a une grande énergie, alors qu’il a soixante-douze ans.
 
Comment s’articule le programme que vous dirigez avec l’Orchestre Philharmonique de Radio-France ?
 
K.O. : Autour de Tarass Boulba de Janacek, la pièce maîtresse du concert, nous avons conçu un programme de couleur slave. Il y a le Concerto pour hautbois de Martinu et la Suite du Lieutenant Kijé de Prokofiev. On peut ainsi mesurer combien, dans cette même « école », les styles se révèlent différents, de la modernité de Martinu jusqu’au côté primitif de Janacek. Le programme comporte également la Symphonie pour violoncelle et orchestre de Britten, qui fut dédiée à Rostropovitch. L’idée de ce concert était par ailleurs de réunir des compositeurs qui ont en commun de n’avoir pas utilisé le dodécaphonisme et qui ont donc choisi d’autres voies que le modernisme de Schoenberg.
 
Quelle sera votre démarche artistique à la tête de l’Orchestre de l’Opéra de Lyon ?
 
K.O. : Il y aura trois piliers forts au niveau de la programmation. Nous donnerons à entendre des pièces rarement jouées, comme Le Joueur de Prokofiev en décembre prochain. D’autre part, il y aura chaque année une création mondiale en collaboration avec le Staatsoper de Berlin et l’Opéra d’Amsterdam. L’idée est de faire tourner l’œuvre pendant un mois sur les trois scènes, avec le même orchestre, les mêmes chanteurs, ceci pour éviter des reprises plusieurs mois, voire plusieurs saisons après la création. En 2010, je dirigerai ainsi la première d’un opéra de Kaija Saariaho, qui prendra la forme d’un monologue interprété par la soprano Karita Mattila. Enfin, nous donnerons le répertoire traditionnel : Manon Lescaut, Werther, Luisa Miller, Parsifal
 
Après six années passées à la tête de l’Orchestre de la Monnaie, quel bilan en tirez-vous ?
 
K.O. : C’est un orchestre très intéressant car il est à la rencontre de deux cultures, la francophone et la flamande. Il y a un vrai impact sur la sonorité de l’orchestre. Les éléments flamands apportent un côté très constructif, tandis que les francophones sont flexibles et ont un beau sens de la couleur. Par ailleurs, il faut souligner que, grâce aux directeurs successifs, Gérard Mortier puis Bernard Foccroulle, nous avons eu la chance de pouvoir donner de nombreuses créations mondiales.
 
Propos recueillis par Antoine Pecqueur


Cardillac : Les 2, 5, 12 et 16 février à 20h à l’Opéra Bastille. Tél. 08 92 89 90 90. Places : 5 à 130 €.
Concert avec l’Orchestre Philharmonique de Radio-France : Vendredi 15 février à 20h à la Salle Pleyel. Tél. 01 42 56 13 13. Places : 10 à 60 €.


Indiscrétion
 
C’est Kazushi Ono qui dirigera la saison prochaine Le Roi Roger à l’Opéra de Paris. L’œuvre de Szymanowski, mis en scène par Krysztof Warlikowski, sera la dernière production du mandat de Gérard Mortier à la tête de l’Opéra de Paris.

A propos de l'événement


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