« Footballeur » de Simon Diard, ou le bouleversement annoncé.
Simon Diard a écrit Footballeur (Editions [...]
Wajdi Mouawad présente une nouvelle version, en libanais, de l’une de ses pièces de jeunesse : Journée de noces chez les Cromagnons. Cette proposition hétéroclite, qui lance des ponts entre le passé et le présent, creuse de façon très personnelle des réflexions sur le poids de l’exil, l’horreur de la guerre, le refus de certains héritages…
Prévue pour être créée au Liban le 30 avril 2024, la mise en scène de Journée de noces chez les Cromagnons conçue par Wajdi Mouawad a finalement été jouée en public pour la première fois le 7 juin de la même année, à Montpellier, au Printemps des Comédiens. La série de représentations prévue à Beyrouth avait en effet été annulée, suite à des menaces formulées contre l’auteur-metteur en scène (né au Liban en 1968) par des activistes politiques anti-israéliens lui reprochant d’anciens échanges culturels avec l’État hébreux. C’est aujourd’hui à La Colline que ce spectacle irrégulier, qui souffre de quelques longueurs, mais se révèle très touchant, nous embarque dans son monde de complexités. Il passe de la comédie à la tragédie, d’un réalisme hystérisé à un onirisme poétisé pour tracer des lignes de contradiction entre la dureté de la guerre et la quiétude de l’exil, entre les envies de renouveau d’une jeunesse désireuse de s’inventer un avenir libéré du passé et des parents transmettant à leurs enfants des fardeaux qui ne sont pas les leurs. Les sujets de cette pièce dont la première version a été écrite en français, en 1991, alors que Wajdi Mouawad vivait à Montréal, sont multiples. Ils éclairent bien sûr la situation politique du Liban, qui aujourd’hui comme hier est sous le feu des bombes. Ils renvoient également à l’histoire personnelle de Wajdi Mouawad qui, dans cette mouture de la pièce écrite en 2024, porte un regard sensible sur son passé et la naissance de son écriture.
La montée en puissance d’une tragédie lyrique
Interprétée en arabe par une troupe franco-libanaise à l’expressivité, au départ de la représentation, un peu expansive (Fadi Abi Samra, Jean Destrem, Layal Ghossain, Aly Harkous, Bernadette Houdeib et la formidable Aïda Sabra), Journée de noces chez les Cromagnons est une plongée dans le quotidien dysfonctionnel d’une famille qui, alors que les combats font rage dans les rues et le ciel de leur ville, se lance dans les préparatifs d’un mariage imaginaire. Car le fiancé qui doit venir, le jour même, épouser la fille Cromagnon, n’existe pas. Aidés de leur voisine, ils s’affairent pourtant toutes et tous en cuisine, entravés par des coupures d’électricités, des tirs de snipers, par leurs débordements et leurs divagations. Mais cet univers familial remuant n’est pas clos sur lui-même. Un protagoniste surgit d’ailleurs pour élargir les perspectives de cette fuite en avant vers l’absurde. Il s’agit de Jean, le double de l’auteur, qui d’abord depuis Montréal, puis directement dans un coin de l’appartement, écrit la pièce que les Cromagnons n’ont pas conscience d’être en train de jouer. C’est même lui qui, à la fin de l’histoire, dans un geste quasi pirandellien, vient à la rescousse de ses propres personnages, frappant à la porte de leur réel pour jouer le rôle du fiancé et tenter de réenchanter leur existence. Cette imbrication des univers et des temporalités, qui n’était pas présente dans les premières versions du texte, est puissante et belle. Comme l’ensemble du spectacle, elle vient affirmer la nécessité d’écrire, de créer, d’imaginer sans cesse, pour apporter une réponse dérisoire, mais essentielle, au basculement de notre monde vers ce que Wajdi Mouawad nomme très justement « l’obscurité du sens ».
Manuel Piolat Soleymat
Du mercredi au samedi à 20h30, le mardi à 19h30, le dimanche à 15h30. Relâche le jeudi 1er mai et le dimanche 4 mai. Spectacle surtitré en français. Durée : 2h. Tél. : 01 44 62 52 52. www.colline.fr
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