« Œdipe / Enquête » par Jean-François Matignon : la force et la noirceur du mythe d’Œdipe
Au Théâtre Transversal, le metteur en scène [...]
Accompagnée à la mise en scène par Giorgio Barberio Corsetti, Gaia Saitta adapte pour la scène le récit d’un fait divers bien connu en Italie, autour de la disparition de deux petites filles. Une traversée touchante et lumineuse qui accorde autant d’importance à la douleur qu’au droit au bonheur.
30 janvier 2011 : jour effarant pour Irina Lucidi, celui où son mari, Mathias, a enlevé leurs deux jumelles Alessia et Livia, âgées de six ans. Le père se suicide quelques jours plus tard et, depuis lors, les deux petites filles sont restées introuvables. Quatre ans plus tard, la jeune femme a confié son histoire à l’autrice italienne Conchita de Gregorio, qui en fait un roman, Je crois que dehors c’est le printemps. Seule en scène, la comédienne Gaia Saitta l’adapte et l’interprète en une ample et délicate traversée non linéaire tout en sensibilité, en nuances, en éclats signifiants. Le récit théâtral conjugue narration d’une tragédie irrésolue et portrait d’une femme qui a connu le pire et qui est parvenue à ne pas sombrer, à retrouver le désir de vivre. Ainsi se côtoient l’incessante douleur de la perte et la douceur de l’amour qui unit les êtres. « La douleur toute seule ne tue pas. Il faut être heureux pour tenir tête à cette douleur inconcevable. Il faut de la peur pour avoir du courage. »
Un théâtre qui répare et une femme qui résiste
Minutieusement agencée, la mise en scène conçue avec Giorgio Barberio Corsetti construit un dispositif ingénieux qui implique le public et retrace l’enquête éperdue menée par Irina. « Peut-être que, dans la mer, elles sont devenues des poissons, des sirènes, des petites baleines… » dit-elle. Son histoire singulière lève le voile sur la folie qui s’empare des hommes malgré les meilleures intentions, sur la violence universelle qui traverse l’histoire des sociétés humaines et que souvent subissent les femmes. Italienne installée en Suisse, Irina s’est séparée de son mari « qu’elle a épousé pour ne pas le contredire », qui ne l’a jamais frappée mais exerçait d’autres types de violence. Au fil du récit, certains spectateurs sont filmés (avec leur accord), figurant divers personnages. Dans une belle présence, l’actrice relaie le combat d’Irina qui résonne, qui saisit son être. En écho à la force intérieure d’Irina, la partition célèbre l’attention aux autres et l’amour de la vie, alors même qu’une telle épreuve condamne à une solitude irrémédiable. Un spectacle touchant, qui fait de la scène un espace de partage au sens fort.
Agnès Santi
à 11h30, relâche les 5, 12 et 19. Tel : 04 90 14 07 99. www.lesdoms.eu
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